Ils s'en vont tous !
Les Israëlien quittent Gaza, et l'ambassadeur d'Israël rentre à la maison.

Michel Lévy   14 Juillet 2005

        Nissim Zvili n'aparait pas comme l'intellectuel brillant qu'était son prédécesseur, Elie Barnavi. On le voit plutôt comme un homme de bon sens au franc parler. Son exposé montre clairement les enjeux d'une politique  sans illusion ni euphorie, qui tente de réparer les erreurs du passé, malgré leur coût impressionant sur le plan idéologique et humain.     

       Nous avons appris que le ministre des affaires étrangères d'Israël n'avait pas souhaité prolonger le mandat de son ambassadeur à Paris. Le cercle Bernard Lazare a invité l'ambassadeur partant, comme il avait invité son prédécesseur, et Mivy était là pour vous faire un compte rendu.  

       Les deux hommes sont très différents, Elie Barnavi donne l'image d'un homme de culture, un poète et un historien, Nissim Zvili sent la terre, on le sent proche des gens et plus simple. En fait ils sont tous deux diplomates et très habiles, et le contraste des personnalités n'est pas déplaisant à voir. 

 

       
            Comme d'habitude, je suis arrivé en retard, mais cela m'a permis d'entrer directement dans le sujet sans me gaver de la tarte au fromage blanc qui est généreusement offerte aux visiteurs qui veulent bien l'acheter au bar...

      «...c'est un processus que je n'ose pas appeler de paix, car je ne sais pas comment il va ses terminer » disait l'ambassadeur, en pensant au retrait de Gaza. « Quand on est obligé de prendre une décision, l'étape la plus importante est d'arriver à une nouvelle position. J'aurais été très déçu si les travaillistes n'avaient n'avaient pas soutenu Sharon, et aujourd'hui, je ne sais plus si nous sommes toujours majoritaires à le soutenir. Pour 2006, je ne suis plus sûr de rien, si la priorité est la paix, if faudra le faire dans une nouvelle structure, car la gauche n'est pas majoritaire. Nous verrons une structure politique très bizarre ! »

      «Du côté palestinien, nous savons que Mahmoud Abbas est une homme de confiance et de bonne volonté. Je le connais depuis de longues années avant l'intifada, et son discours n'a jamais varié. En ce moment, il est dans une situation très délicate, il a du reporter les élections législative, il n'est pas compris par ses extrémistes qui considèrent que tout geste de bonne volonté est un signe de faiblesse. Pendant ses premiers mois, il essayé d'intégrer le Hamas, c'est une bonne initiative, mais la réponse du Hamas est inquiétante. Les renseignements généraux disent que nous vivons dans un calme illusoire, les organisations para-militaires n'ont pas décidé de faire cesser les attentats. L'armée répond qu'elle est assez puissante pour se permettre de prendre un certain risque.

      Il n'existe pas, du  côté israélien d'euphorie, comme on en a connu après les accords d'Oslo, on prend des risques calculés, et l'opinion partage ce sentiment, de réalisme, de pragmatisme, et d'attentisme. 

Besoins d'une plus grande coopération avec la France

«On sent des améliorations, dans les relations entre la France et Israël, trois points sont essentiels :

è Attitude vis à vis de l'Iran, du Hezbollah, et de la lutte anti terroriste.

        Je suis très prudent vis à vis du nouveau président Iranien, son concurrent n'était pas un ami, il n'avait que peu d'influence car il dépendait des Ayatollahs qui avaient la réalité du pouvoir. Il en sera de même pour son successeur. Or depuis quelques temps, on a senti en Iran une volonté de casser l'isolement du pays et de reprendre le contact avec les USA. Il ne faut donc pas juger a-priori de nouveau président, il faut lui laisser du temps, attendons de voir ses actes avant de nous prononcer. Ce qui est plus inquiétant, c'est la mauvaise vue des occidentaux qui n'avaient pas prévu son triomphe !
      La menace nucléaire existe, en Israël on est convaincu que l'Iran ne renoncera pas à l'arme nucléaire, car la république islamique croit que c'est le meilleur pour devenir une puissance régionale. Ce que nous craignons c'est l'effet de contagion. Pourquoi la Turquie, l'Arabie, l'Egypte laisserait-il le leadership militaire à l'Iran ? eux même se sentent menacés.
      Nous aimerions empêcher ce désastre, mais nous n'avons guère d'options réalistes. Il faut donc appuyer la pression de l'Europe et des États Unis. Je ne crois pas à l'option militaire.

è Volonté de renouer de bonnes relations avec ses alliés naturels.
        L
a volonté de l'Europe de rebâtir les relations trans-atlantiques, en se servant entre autre du levier israélien, rejoint le souhait d'Israël de rééquilibrer sa diplomatie
. L'Europe est le premier partenaire commercial du pays, et il est très malsain de mettre «tous ses oeufs dans le même pannier». Jacques Chirac restera en place jusqu'en 2007. De 2005 à 2007 nous aurons un grand besoin du soutien de tous, d'où la nécessité de rebâtir des relations humaines avec des leaders européens comme Jacques Chirac.
      On ne compte pas sur l'étranger, on veut créer une nouvelle réalité politique au Proche Orient, nous savons que ce sera long, mais on ne peut pas rester sans rien faire. Il n'est pas intelligent de dire que tout le monde, tout le temps est contre nous. C'est faux et cela ne mène nul part.
    L'invitation de Jacques Chirac à Ariel Sharon doit donc être perçue comme un soutien au plan de désengagement. Jusqu'à fin 2005, il y aura des épreuves difficiles pour nous, et l'Europe, qui souhaite ce désengagement doit comprendre l'enjeu de cette première étape. S'il échoue, ce sera la première et dernière étape. Mahmoud Abbas et les USA l'ont parfaitement compris.


è Rôle moteur du plan de désengagement.
      C
e plan qui est de moins en moins unilatéral doit bien être compris, il n'est pas fait dans l'intérêt des palestiniens ou des puissances étrangères. C'est la réponse à une simple question : Où sont nos intérêts ?
 
     N
ous ne voulons pas annexer Gaza par ce que nous voulons conserver un caractère juif à l'État d'Israël, et si nous continuons à occuper une population qui ne veut pas de nous, nous perdons notre caractère démocratique. C'est bien pour rester un état Juif et Démocratique qu'il faut se désengager.   
      S
i nous voulons avoir un jour un partenaire responsable, il faut le responsabiliser, et lui laisser une autonomie complète. Il est toujours difficile de lutter contre le terrorisme, en particulier contre Al Quaïda qui fera tout pour empêcher le désengagement. Al Quïda n'a pas de tête, on ne peut donc pas la couper.

      N
ous devons comprendre le drame des gens qu'on chasse de chez eux, ils sont venus dans le Goush Kativ à notre demande, nous les dirigeants de gauche comme de droite. Nous leur avons dit qu'en venant à Gaza, ils participeraient à la défense du pays, qu'ils étaient des pionniers etc...  et aujourd'hui ils ont l'impression qu'on les jette.  Ils s'opposeront de toutes leur force à leur déménagement, et ils sont soutenus par une partie importante du public religieux. Il n'y aura pas de «bain de sang» à Gaza, mais nous frôlerons la guerre civile.

      L'armée devra avoir beaucoup de sagesse.