Conférence
au cercle BERNARD LAZARE
Élie BARNAVI
Ambassadeur d'Israël en France, en fin de mandat
22 septembre 2002
La philosophie du grand Israël est morte et enterrée, les palestiniens se détournent d'Arafat, alors nous pouvons être raisonnablement optimiste !
Vous
savez dit l'ambassadeur en introduction, on m’invite en général en raison
de mes fonctions, mais avec le Cercle Bernard Lazare, c’est différent,
j’étais en relation avec lui avant mes fonctions, je le suis resté pendant
mes fonctions, et je continuerai après mes fonctions. J’ai plusieurs
réunions comme ce soir, non pas par semaine, mais par jour, et presque
plusieurs fois par jour ! mais au cercle Bernard Lazare, j’y ai
des frères et même des sœurs, car nous avons surtout quelques idées
en commun.
En fait, je dois vous parler, mais je ne sais pas de quoi, pourriez vous me rappeler le titre de la conférence ? l'animateur lui répondit " La situation en Israël est-elle en train d’évoluer ", il répondit, " elle évolue hélas ! " On vint prévenir l’ambassadeur d’un coup de fil, il réapparut quelques minutes plus tard, et nous dit, " Comme je vous l’avais dit, cela ne va pas très bien, on a eu deux attentats coup sur coup, et maintenant, on bombarde la Moukata, ou ce qu’il en reste… " Je pense, dit il que cette Intifada a été un crime contre la paix, et là je retire mon habit d’ambassadeur, l’intifada a été illégitime et suicidaire. Le mauvais génie de la région est Arafat. Israël a eu raison d’utiliser les moyens militaires, nous avons détruit l’embryon d’état mais cela ne suffit pas il faut un volet politique " . Si nous avions eu un autre premier ministre, la politique aurait été la même.
L’intifada de 1987 était justifiée, il n’y avait pas d’ouverture, mais aujourd’hui, déclencher une insurrection alors que la solution était sur la table cela était criminel, depuis que je suis à Paris, j’essaie d’expliquer, et j’ai parfois été entendu, qu’Arafat s’est aliéné son seul allié important : la gauche israélienne. |
Les moyens de l’Intifada sont aussi inacceptables, les attentats suicides méprisent la vie, y compris la sienne. Même au pire moment de la Shoa, nous n’avons jamais cherché à tuer des civils allemands. Si j’avais été Arafat, je n’aurais pas signé à Camp David, je comprends qu’on dise ‘Non j’en veux plus’, mais à ce stade, on ne peut pas déclencher une guerre. Pendant que ses négociateurs approchaient à Taba d’un accord complet, à Davos, Arafat s’est réfugié dans l’insulte en traitant les israéliens de Nazis. La violence était illégitime. Ce personnage est le mauvais génie du proche orient, mégalomane il affirme être le meilleur général du monde arabe depuis Saladin, il affirme à qui veut l’entendre que ce sont les israéliens qui ont commandé les attentats d’Al Quaïda à New York, il ment sans se soucier d’être crédible, ses faiblesses se retrouvent en général dans ses discours où l’on recherche en vain la lucidité qui aurait fait de lui un homme d’Etat. Il s’est auto convaincu que les attentats décourageraient le peuple d’Israël qui s’abandonnerait au désespoir, c’est cette mauvaise connaissance de l’adversaire qui l’a mené là où il est. Barak, lui est un excellent négociateur, à condition qu’il négocie avec lui-même, car avec les autres il échoue régulièrement. Il aurait pu faire la paix avec la Syrie, il s’est retourné brutalement vers les palestiniens, où il a également échoué. Oslo a été un mauvais accord, parce qu'on n'a pas clairement défini les objectifs. On a continué à bâtir des implantations, comme si l'on ne devait pas favoriser la naissance de l'État palestinien. Barak c’est un très mauvais tacticien, par contre Arafat est un très mauvais stratège. La société palestinienne s'est retrouvée aussi pauvre et désorganisée qu' en 1939, elle a tout perdu, alors que nous voyions sous nos yeux naître un état. |
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Existe-t-il un
espoir ?
Les sociétés palestiniennes et israéliennes sont lasses du sang inutile.
Quelque chose bouge : la philosophie du " Grand Israël " est morte et enterrée, et les palestiniens contestent Arafat. Il suffirait que les chefs suivent leur peuple, et ceci serait d’autant plus facile que les états arabes ont peur que le terrorisme déteigne sur leur propre territoire, et que les " grands " souhaitent éteindre l’incendie qui risque aussi d’avoir des répercussions fâcheuses chez eux. Lentement les pièces du puzzle se mettent en place.
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La haine entre les peuples n’est pas un véritable obstacle, j’ai souvent eu beaucoup plus de mal à discuter avec des français amis des palestiniens qu’avec les palestiniens eux même. On ne s’aimera pas beaucoup, au moins pas beaucoup tout de suite, mais a-t-on besoin de s’aimer ? Si nous attendons qu’il y ait de l’amour, nous n'aurons jamais la paix. Je souhaite une paix froide et après nous verrons comment la réchauffer. Eux chez eux, et nous chez nous, le seul point important pour nous c’est la sécurité. Pour y arriver, il faudra qu’une fraction palestinienne prenne le pouvoir par n’importe quel moyen, et s’y maintienne d’autorité, éventuellement au moyen d’une guerre civile inter palestinienne. Israël a eu ce même problème lors de son indépendance, et Rabin n’a pas hésité à faire tirer au canon sur un bateau juif venu apporter des armes à un groupe dissident. L’unité nationale, l’existence même de l’état suppose la destruction des armées et milices qui n’obéissent pas au souverain. Les rois de France et Ben Gourion l’avaient compris. Les libanais et les palestiniens devront passer par là s’ils veulent exister. Les relations bilatérales entre la France et Israël n’ont jamais été aussi mauvaises qu’on aurait pu le croire. Il existe des pays européens où cela est beaucoup plus difficile. Toutefois, et cela désole l’homme de gauche, depuis le nouveau gouvernement le ton s’est beaucoup amélioré, l’atmosphère a changé. Quand on lui a demandé pourquoi il quittait son poste, Elie Barnavi a répondu que son contrat arrivait à expiration, il a laissé entendre que certains dans les couloirs se sont arrangés pour qu’il ne soit pas renouvelé, il faut savoir que son successeur sera un collègue issu du même parti politique que lui, on ne pourra pas y voir une volonté de " la droite " de placer des hommes plus sûrs. En Israël, l’ex ambassadeur compte retourner à l’Université pour enseigner, et aussi participer à rebâtir une gauche sioniste. Qu'est-ce que la gauche sioniste ? cela peut faire l'objet d'un séminaire ! vous le saurez peut être en lisant la lettre au Judaïsme français que l'ambassadeur a écrit, et qu'il publiera dès son départ ! ! Michel Lévy Boulogne le 22/9/2002
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