Envoyés très spéciaux
mercredi, 6-mai-09

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Le cinéma déforme, pour le meilleur ou pour la pire la réalité, mais il ne peut pas imaginer sans se référer à ce qui existe. On rit devant cette superbe comédie, mais ceux qui savent ce qu'il y a derrière, rient parfois jaune. Ce n'est pas un hasard si au cours d'une conférence de presse de Philippe Karsenti, sur l'Affaire Enderlin, tout le monde a sourit quand on a fait allusion à des envoyés très spéciaux !

 
 

J'ai eu le plaisir de voir "Envoyés très spéciaux" , c'est un film super, un vrai moment de détente qu'on peut partager en famille, le synopsis le plus courant est celui ci : « R2I, célèbre radio d'info, envoie en Irak son meilleur duo de reporters : Frank, journaliste, et Poussin, ingénieur du son. Très vite, c'est par millions que les auditeurs suivent leurs récits très documentés, reflétant "à chaud" l'intensité des combats et la difficile survie de la population.

Le jour où Frank et Poussin sont victimes d'une prise d'otages, un mouvement de solidarité d'une rare ampleur s'organise pour obtenir leur libération : autour du slogan "un euro pour nos otages", la France se mobilise en masse.

Mais le gros souci pour Frank et Poussin, nos deux envoyés très spéciaux, ce n'est pas vraiment la prise d'otages : leur vrai problème, c'est plutôt qu'ils n'ont jamais mis les pieds en Irak, et que les récits haletants qui ont fait leur notoriété, c'est depuis Barbes qu'ils les enregistrent...*

Une comédie française de Frédéric Auburtin, avec Gérard Lanvin, Gérard Jugnot, Omar Sy, Anne Marivin, Valérie Kaprisky, Serge Hazanavicius et Bertrand Lacy.

Franck Bonneville (Gérard Lanvin) est LE reporter renommé de la radio R2I à qui elle doit notamment sa place de deuxième radio de France, pour le plus grand bonheur de son directeur Jacques Maillard (Serge Hazanavicius). Alors que de nouveaux évènements ont lieu en Irak, Maillar y envoie son meilleur reporter accompagné d'Albert Poussin (Gérard Jugnot) qui vient de se faire plaquer par sa femme Françoise (Valérie Kaprisky). Mais suite à la malencontreuse perte des billets d'avion et des 20 000 Euros en liquide dans une poubelle... nos deux compères ne quitteront pas le territoire et devront enregistrer tous leurs reportage depuis le quartier de Barbès où ils se sont planqués. Bien vite ils vont devenit otages et toute la France va se mettre en 4 pour les libérer... »

 

Certains n'ont pas aimé, comme Giulio, "la route du cinéma", d'autres se sont fanchement marré comme Mandor , surtout qu'il a participé au tournage.

Les forums, et le sondage montrent que le film a été relativement peu commenté, que l'opinion du public est comme d'habitude divisée et portée naturellement aux jugements définitifs et excessifs.

Ce type de distribution est courante dans les opinions des téléspectateur, on peut déduire de cette répartition d'une part que la masse des gens donnant leur avis n'est pas énorme, donc que le film n'a pas fait un tabac ! et d'autre part que les avis sont partagés avec quand même une nette préférence pour ceux qui ont passé un bon moment

Les spectateurs se sont prononcés sur la vraisemblance du scénario, sur la qualité plus ou moins lourde de l'humour, sur le jeu des acteurs plus ou moins crédibles, mais personne ne s'est penché sur le fond, sur la manipulation.

On a écrit que c'était une comédie à la Française sans prétention, mais si c'était juste le contraire ?

C'est une comédie de moeurs

Le film m'a enthousiasmé, par ce qu'il est humain, qu'il montre comment l'opinion est manipulée, j'y ai vu une ressemblance avec un autre film plus ancien "promotion canapé", où on voyait la course entre le ministre des Postes et de l'agriculture pour se faire bien voir des médias, et une fausse prise d'otage. L'opinion dans les deux cas croit ce qu'elle voit, et s'enthousiasme portée par ses bons sentiments loin de s'imager où se cache la vérité.

Le but poursuivi par la chaine de TV d'envoyés très spécial est de doper l'audience, la prise d'otage est un bon moyen, «un euro pour nos otages !» et on met le paquet pour la bonne cause. On a vu tout un pays se mobiliser pour défendre des otages, il y a eu Ingrid Bétancourt, il y a Guilad Shalit, chacun se sent mousquetaire : "Un pour tous, Tous pour un". Pourtant, derrière ces drames réels et caricaturés dans le cinéma, il se cache toujours des tractations politiques au plus haut niveau, et les gens qui n'écoutent que leur bon coeur, ne sachant pas ce qui se trame derrière. Souvent des guerres sans merci entre services secrets, voir entre services tout courts, et une communication qui joue au billard pour atteindre ses buts.

Ce film m'a fait rire, franchement au premier degré, et jaune au second. La plupart des critiques et les habitués des forums n'y ont vu qu'une comédie légère. Mais tous ceux qui suivent l'actualité du Proche Orient savent combien les bidonages sont fréquents et parfois criminels.

 

 
L'affaire Al Dura : ce que Charles Enderlin, envoyé très spécial veut faire croire  


U
ne manipulation de l'opinion sans précédente a été initiée par France 2, pour des raisons mystérieuses. Le mensonge est défendu comme un secret d'état, par la chaîne publique française.

J'ai été invité par Philippe Karsenti à une conférence de presse, où l'essentiel de cette affaire qui est maintenant ancienne a été résumé :

* Un film de trois minutes a été offert en automne 2000, à toutes les télévisions du monde par France 2. Ce film présente la mort d'un enfant palestinien en direct, tué selon Charles Enderlin par des balles Israéliennes. La mort de cet enfant sera le symbole de l'intifada des mosquées. Cet "assassinat" provoquera des mouvements de foule impressionnants dans tout le monde islamique, des timbres le commémoreront, en son nom des attentats suicide auront lieu. Sans ce film l'intifada et ses milliers de morts n'aurait pas pu se développer.

Aujourd'hui, dix ans après nous savons qu'il s'agissait d'une fiction de propagande.

  • Le Cameraman, Talal Abu Rahma, unique témoin de l'événement est un militant du Fatah, et a affirmé «J'ai choisit le journalisme pour défendre la cause palestinienne». Il s'est rétracté et contredit plusieurs fois.
  • Charles Enderlin, qui n'a rien vu ni vérifié, affirme sa confiance absolu en cet homme. Pour ceux qui le soutiennent personne n'a le droit de mettre en cause la bonne foi de France Deux. Cette présomption est supposée irréfragable ( l'adjectif "Irréfragable" qualifie certaines présomptions de droit lorsque la loi y attache un caractère absolu. L'irréfragabilité rend irrecevable l'offre d'administrer la preuve contraire. ) Talal Abu Rahma a obtenu la nationalité française, mais depuis il a perdu sa carte de presse.

  • Tala Abu Rahma affirme que pendant 45 minutes, les soldats israéliens se sont acharnés sur le pauvre Mohamed Al Dura et son père à l'arme automatique. On dénombre une dizaine de traces d'impact.
  • L'impact des balles sur le mur est rond, ce qui veut dire qu'ils ont été tirés en face, elles ne proviennent pas de la position israélienne. Le couple n'a pas été touché par des balles perdues et encore moins visé intentionnellement.
  • Les balles de guerre des fusils M13 font des dégâts considérables. la balle qui aurait tué l'enfant l'aurait transpercé complètement selon le rapport d'autopsie. Or, on a vu un homme blessé par une dizaine d'impacts, et un garçon troué de tous les coins sans la moindre hémorragie, ni la moindre trace de sang ou de projection sur le mur. Physiquement c'est impossible.
  • Le père a été hospitalisé à Amman pour y être soigné, mais le rapport des médecins a été publié trois jours avant son arrivée. On l'a photographié, le bras plâtré, avec du sang sur le plâtre. Absurde, médicalement on ne plâtre jamais une blessure ouverte, et si une blessure saigne, l'hémorragie ne peut pas traverser le plâtre. En tout état de cause, après consolidation la blessure du père montrée aux caméras est à l'évidence une blessure à l'arme blanche.
  • Un enfant a été tué par balle le même jour, le matin, on l'a transporté à l'hôpital de Gaza où une autopsie a été pratiquée à 10 h, cet enfant a été présenté comme Mohamed Al Dura, qui aurait été tué à 15 h. Les obsèques publiques de l'enfant de la morgue ont été présentées comme celles du petit Al Dura.
  • Le père dit être parti pour acheter une voiture d'occasion, il n'était pas sur la route du marché, et ce jour là il n'y en avait pas. La mère prétend avoir appris la mort de son fils en regardant France2. On ne voit pas pourquoi cette dame qui ne parle pas français aurait capté cette chaîne, le pouvait-elle seulement ?
  • Au tribunal, on a montré le film, avant tout des scènes visiblement jouées, mais pour prouver le meurtre, des scènes au ralenti ont été projetées, on entendait le bruit des rafales de M16 : absurde, quand on passe un film au ralenti, le son ne passe pas ! !
  • Grâce à une analyse biométrique des visages, il a été prouvé que l’enfant filmé par France 2 n’est pas celui montré à la morgue de Gaza et enterré plus tard. Les sourcils et les lèvres des enfants diffèrent complètement.
  • L’équipe de télévision allemande a utilisé la technique de lecture labiale (afin de lire sur les lèvres du père de l’enfant). Ils ont ainsi pu découvrir que Jamal al Doura donnait des instructions à des personnes se trouvant dans la direction du caméraman de France 2.

    Des pressions énormes sont exercées sur tous les organismes souhaitant laisser la parole à Philippe Karsenti, ce dernier a été obligé de tenir secret le lieu de sa conférence de presse, dans un restaurant privé
 
Comment expliquer cet acharnement ?  

L'affaire pourrait simplement être close, si France Deux acceptait de reconnaître qu'elle s'est laissé abuser et avait diffusé un film de propagande. Ce n'est pas impossible, vu qu'elle l'a déjà fait par la suite. Par exemple pendant la guerre de Gaza, France Deux avait été surpris à diffuser un film d'archive présenté comme actuel, dès l'erreur établie, la chaîne s'en était excusée.

Rien n'interdit de penser que dans un premier temps la chaîne publique et son correspondant permanent à Jérusalem ait pu être abusé par leur correspondant très particulier. Mais l'acharnement de Charles Enderlin, le soutien indéfectible dont il dispose auprès des ses collègues, et de nombreux diplomates ne peut manquer d'interpeller.

On ne peut s'empêcher de penser à l'affaire Dreyfus, à l'époque beaucoup de militaires avaient des doutes sur la culpabilité du capitaine, mais défendre l'honneur de l'armée et de la Patrie était un devoir plus important que la manifestation d'une vérité qui dérangeait. Esterhazy, qui vendit les documents à l'Allemagne, s'était fait remarquer par une inconduite notoire, ses absences injustifiées, son goût pour le jeu, ses propos auraient du lui valoir bien des ennuis, cependant il a profité d'une protection incompréhensible, d'une présomption irréfragable d'innocence.

Contrairement à l'Affaire, le «Faux Enderlin» n'a pas provoqué en France de manifestations de masse, et n'a pas provoqué de tentative de coup d'état. Selon Philippe Karsenti, le reportage a eu des conséquences énormes en terme d’antisémitisme (les chiffres du ministère de l’Intérieur parlent d’eux-mêmes), mais en plus il a radicalement modifié la perception des politiciens français vis-à-vis d’Israël et des juifs français qui soutiennent Israël.

Ce film a été à l'origine de la campagne tendant à coller l'image de tueur d'enfant à l'armée israélienne devenue ainsi l'ogre du monde islamique. Cette campagne ne s'est jamais démentie depuis et a été systématiquement reprise et renforcée à chaque occasion. Aujourd'hui, l'expression tueur d'enfants pour désigner les "sionistes", (euphémisme pour désigner les juifs) sur les forums islamiques est systématiquement utilisée par les militants.

Si France Deux avait reconnu son erreur, l'icône de la violence aurait été brisée, et les pays musulmans auraient été mis dans l'embarras. De Bamako au Caire, des places et des avenues avaient pris le nom d'un comédien supposé assassiné ! ! Comme au moyen âge, l'enfants chrétiens «assassinés par des juifs pour boire son sang», serait rentré à la maison, mais la communauté juive locale avait été lynchée au par avant par la foule en colère.

Cette situation aurait été trop gênante, et la diplomatie Française, qui avait offert le poison au monde entier, a évité de donner l'antidote. L'honneur des menteurs a plus de poids que la vie des innocents.

Michel Lévy