La
guerre d'Irak a été rapide, en quelques semaines les troupes de Saddam
Hussein se sont effondrées, il y a eu des morts, mais ce ne fut pas le
massacre que certains attendaient. Il n'y a pas eu de combat de rue dans
les villes, et Bagdad est tombé sans combat.
Les
troupes américaines en Irak peuvent évoquer les troupes Napoléoniennes
en Europe. Elles ont été attendues par les uns, et redoutées par
les autres.
L'attente
vient du goût pour la liberté de certains, et la crainte vient de la
hantise de la liberté pour d'autres. Bush comme Napoléon sont les fruits
d'une idéologie libérale même s'ils ne peuvent pas être considérés
comme des modèles de démocrates, même si leurs ambitions et leurs
appétits sont contraires à l'idéologie qu'ils sont sensés
représenter.
L'agression
de la modernité n'a pas attendu Napoléon ni Bush pour pénétrer en
Europe ou en Irak, mais les pouvoirs en place avaient réussi à la
dompter jusqu'à l'invasion des français ou des américains.
La
défaite des tyrans va secouer les peuples qui vont parfois accueillir
l'empire comme libérateur, on l'a vue à Mayence, en Italie, dans le
Kurdistan. Ailleurs les religieux verront la main du diable et
des athée dans les armées impériales, et toute collaboration avec Satan
sera intolérable. Il faut penser à la guerre d'Espagne, et aux
réactions islamistes.
Les
soldats de Napoléon se sont fait détester en Espagne où ils ont été
amené à commettre de nombreux crime de guerre, excédés par une
résistance fanatique au sens plein du terme. Les peintures de Goya en
marquent la trace, en même temps, les mêmes soldats français ont
laissé un souvenir amical en Italie, où l'on trouve toujours des places
Napoléon. Ils n'y ont pas commis d'atrocités, car les Italiens n'ont pas
pratiqué la guérilla à leur encontre.
Les
défaites de l'Empereur ont rendu le pouvoir aux vieilles monarchies, mais
les peuples ont été contaminés par les français. Peu de temps après
la défaite impériale les révolutions éclatèrent en Allemagne et en
Italie, non pas pour réclamer les Français, mais pour pour faire comme
eux, avoir chez soi un état à soi. L'Allemagne et l'Italie sont un peu
les enfants posthumes de Napoléon.
Et
l'Espagne dans tout cela ? l'Église et les forces réactionnaires
ont triomphé, et il faudra attendre l'invasion des touristes dans
les années 1950 pour que la liberté pénètre ce pays.
L'Irak
va sûrement se débarrasser des américains, mais elle est à la croisée
de chemins, va-t-elle suivre la route des allemands et des italiens, ou
celle des Espagnols ?
La
guérilla qui commence n'augure rien de bon, les forces réactionnaires la
veulent et l'encourage, ils savent qu'elle conduira les américains à se
comporter comme les français en Espagne, ils savent que désorganiser
l'économie augmentera le chômage donc le nombre de mécontents, et que
si la victoire revient à la rebellion armée, les forces de liberté
retourneront en prison pour longtemps encore.
Alors
qui va gagner ? les espagnols ou les allemands ? en fait si
les américains ne réussissent pas à se faire aimer, il vaut mieux la
solution espagnole, ce serait beaucoup moins dangereux !
Michel Lévy