Mivy décoiffe, car il est fait par un chauve

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Yom Rachi
Jour de Rachi à  Troyes

L'actalité, comme Mivy la voit

Mivy décoiffe, car il est fait par un chauve

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Yom Rachi
Jour de Rachi à  Troyes

Les instances nationales et officielles du judaïsme français ont organisé un grand rassemblement en mémoire de Rachi, qui est né en 1040 à Troyes.

Ce fut une journée magnifique, en l’honneur de la France, et de la communauté juive. Rappeler notre histoire commune et notre richesse culturelle est nécessaire en ce début du XXI ième siècle.

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Le 10 juillet 2022, Troyes était à l'honneur, car le tout nouveau président du consistoire central des communautés juive de France, Elie Korchia, du Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, du maire de Troyes François Barouin, et du président du centre communautaire Rachi de Troyes, René Pitoun ont organisé un grand meeting, réunissant deux mille personnes en l'honneur du judaïsme français, symbolisés par Rabbi Shlomo Itzh'aki - Maître Salomon fils d'Isaac, dit Rachi

Troyes, c'est la ville où mon papa est né, et où mon arrière grand père, Léopold, s'est installé avant 1900. J'y ai passé mon adolescence, la ville à l'époque était industrieuse et industrielle, il y avait plein d'usines et plein de vélos, il y avait une petite communauté juive, bien vivante grâce au dévouement de personnes très motivées, parmi lesquelles des industriels en bonnèterie (1). En classe de première, j'ai fais un stage dans l'usine de bonnetrie de M Rosen, les tricots Rozana... et déjà en 1960, on commençait à s'inquiéter de la concurrence grandissante du tiers monde...

Cependant, la communauté Juive s'enrichissait de nouveaux arrivés du Maroc d'abord, en premier notre Rabbin, Abba Samoun, puis M Margen... et les locaux occupés rue Chardonneret devenaient trop petits. Alors, les dirigeants de la communauté ont trouvé une vieille bâtisse, passablement délabrée, avec plein de pièces les unes plus sombres que les autres, très peu confortables, et pas du tout aux normes à vendre pas trop cher. Le bâtiment entourait une petite cour qui rendit d'immenses services en 1962, quand le bâtiment servi de cuisine pour les réfugiés débarqués d'Algérie, et envoyés à Troyes par l'administration.

L'immeuble, 5 rue Bruneval datait du XVI ième siècle, il était en bois et en torchis, et appartenait à l'église, qui n'avait pas le droit de vendre pour un culte étranger. Une société civile fut crée afin que la transaction soit légale vis à vis du droit canon, et ainsi la communauté de Troyes a disposé de vastes locaux. Personne n'a hésité, on a abattu une cloison au rez de chaussée pour faire une synagogue, et l'ensemble fut nommé centre communautaire Rachi.

En 1962, la communauté a explosé, elle s'est enrichie de familles merveilleuses venues d'Algérie, et la vie à continué, j'ai quitté Troyes, et le centre Rachi s'est agrandi et embelli sans cesse. La synagogue a été agrandie, en sacrifiant la cour où mes louveteaux et moi faisions des parties de balle aux prisonnier, elle s'est doté de vitraux magnifiques. Voici l'évolution de la «Shule» entre 1956 et 2022. A noter en 1956, il n'y avait pas de "kipa". A la synagogue on portait le chapeau, à défaut le béret.

Un vitrail de Flavie Vincent-Petit s’est inspirée de la ménorah, et représente l'arbre généalogique de Rachi, qui a servi d'illustration à la journée de Rachi, le Yom Rachi

 

Mais qui était donc Rachi ?

Né en 1040 à Ramerupt, près de Troyes, Maître Salomon fils d'Isaac connu sou le nom de Rachi, (RAbi Chlomo ben Izh'ak) est parti parfaire son éducation à Worms et à Mayence au bord du Rhin, et ce travailleur acharné a commenté quasiment toute la bible et une très grande partie du talmud de Jérusalem. Sa réputation était immense et débordait largement le cadre de la communauté juive. En effet, Troyes était à l'époque le centre de foires européennes de la plus grands importance, et les idées voyageaient avec les gens. Le franciscain français Nicolas de Lyre (1270-1349) citait si souvent les opinions de “ Rabbi Salomon ” (Rachi) qu'on l'avait surnommé "Le singe de Salomon". Nicolas de Lyre a été le grand inspirateur de Luther. (*)

Aujourd'hui, il n'existe pas de bible juive commentée qui ne mentionne les interprétations de Rachi, et quasiment tous les ouvrages du Talmud ajoutent ses commentaires. Le savant a eu réputation d'être un vigneron, car ses explications sur le vin cachère, montrent une parfaite connaissance de la vigne et de la vinification. Mais Ariel Tolédano émet l'hypothèse qu'il aurait aussi bien pu être médecin, « Comment ne pas s’interroger quand on constate la précision avec laquelle Rachi aborde de nombreux domaines médicaux : la prévention, l’hygiène, l’anatomie, la nutrition, la fertilité… »

Rachi parlait français, et écrivait en hébreu, pour expliquer certaines phrases, il a trouvé les mots justes en français écrits en lettres hébraïques, grâce à cela, on connait la prononciation d'il y a 1000 ans pour plus de 3000 mots français. Comme il n'a pas eu de garçons, il a instruit ses filles, et leur a trouvé des maris parmi ses disciples les plus prometteurs, eux et leurs descendants ont continué son œuvre, et pendant 150 ans ces "tossafistes" (ajouteurs) ont enrichi et précisé les interprétations des livres saints.

Rachi est redevenu une personnalité Troyenne.

A la fin des années 1960, la crise de la bonneterie a frappé la ville Troyes, la France ne pouvait plus supporter la concurrence du tiers monde. La ville de Troyes, qui était dirigée indirectement par des industriels s'était opposé à toute diversité économique afin de ne pas pousser les salaires à la hausse, et la ville n'avait ni université, ni aucun espoir visible de reconversion. C'est alors que la mairie a pensé au passé médiéval glorieux de la ville. Troyes était un lieu de rencontre grâce aux foires de Champagne, c'était une capitale artistique, il suffit d'admirer les innombrables églises où les dentelles de pierre font rêver, c'était la ville où l'auteur de la Chanson de Roland, Chrétien de Troyes était né, c'était la ville de Bernard de Clairvaux fondateur de l'ordre des cisterciens, et celle de Rachi. Bernard et Rachi se connaissaient et s'estimaient. Tous deux ont une réputation mondiale.

Ainsi la ville s'est appuyé sur eux pour recréer un vile culturelle importante, et pour rayonner mondialement. Rachi est connu dans le monde Juif à travers toute la Terre, et l'ordre des Cisterciens a joué une rôle fondamental dans l'histoire européenne. Rachi est devenu un argument touristique important pour attirer des visiteurs, en particulier américains dans la capitale historique de la Champagne.

On a crée un institut universitaire européen Rachi où ont lieu des cours et des conférences réunissant chercheurs et étudiant venus parfois de très loin.

La communauté juive a profité de la surface de ses locaux, pour organiser à l'intérieur un musée, où on peut admirer non seulement les vitraux récents crées par des artistes de talent, dont Flavie Vincent-Petit qui s’est inspirée de la ménorah – le chandelier rituel à sept branches – rehaussé de fleurs d’automne.
On peut voir exposé d'autres objets, des livres et documents en relation avec Rachi et son œuvre.

Le consistoire central a aussi besoin de Rachi

Elie KorchiaLe consistoire central des israélites de France est une vieille institution crée sous Napoléon Iier. Sa vocation est d'assurer le culte israélite, et elle représente le judaïsme religieux auprès des autorités. (Alors que le CRIF représente les institutions juives laïques ou non). Le consistoire vit une situation difficile, d'abord par ce qu'en France l'athéisme devient largement majoritaire, Dieu laisse indifférent chrétiens et juifs. Les unions entre personnes juives et non juives sont de plus en plus fréquentes, avec ou sans mariages, et le judaïsme orthodoxe ne reconnait comme juif, que les bébés nés d'une mère juive. Des communautés dissidentes, sont souvent très dynamiques, et sans aucune animosité prennent de nombreux fidèles au consistoire, je pense par exemple au mouvement Habad, ou Loubavitch qui est un concurrent redoutable. Ailleurs, les communautés libérales, et traditionnalistes se développent, au détriment du consistoire.

L'institution vit aussi une contradiction interne, entre un corps rabbinique formé de plus en plus à l'israélienne, et de plus en plus rigoureux, et des communautés juives locales en complet déphasage. Si bien que le Grand Rabbin de France, qui est l'élu des présidents de communauté, et qui bien vu des autorités de la République, est toujours confronté à une opposition sourde du corps rabbinique très influencé par des idées plus conservatrices venues du judaïsme israélien.

Le consistoire vient d'élire en octobre 2021, à sa présidence un candidat unique, Elie Korchia, qui avec le Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, a la périlleuse mission de maintenir la place prédominante du consistoire central sur les autres tendances religieuses, et d'enrayer autant que faire se peut la tendance à l'assimilation qui anémie la communauté juive.

Le Yom Rachi, expression d'un affichage fort

La communauté Juive de Troyes est petite, et très fière de Rachi, et depuis plus de dix ans, rêvait de faire une "hilloula", une grande fête en son l'honneur. Mais seuls, René Pitoun, aidé de quelques piliers de la communauté, dont Philippe Bokobza n'avaient pas les moyens de faire quelque chose de grand. Ils ont eu l'idée d'en parler à Élie Korchia, et cela a fait tilt. Le consistoire a pris l'affaire en main, il a mis dans le coup le Grand Rabbin de France, et a conçu une manifestation capable de réunir plus de mille personnes.

Il fallait mettre à l'honneur le judaïsme français, en s'appuyant sur la personnalité de Rachi. Pour cela, on allait réunir au cours de deux tables rondes des personnalités de renom, animées par le télé-rabbin, Didier Kassabi qui présente tous les dimanches l'émission religieuse à la Télévision. Il s'agissait de montrer l'encrage du Judaïsme dans la France, et réciproquement.

Pour que la journée soit complète, il fallait aussi une exposition d'artistes contemporains de haut niveau, et des spectacles capables de séduire le public. Pour cela, on a fait appel à Steve Suissa, qui a réalisé un spectacle chanté retraçant l'histoire récente du judaïsme, et pour la soirée, le clou de la journée, «Les adieux du Magnifique» avec Michel Boujenah une avant première de son prochain spectacle.

Il fallait une sacrée organisation et des moyens, il se trouve que Haïm Korsia Grand Rabbin de France est l'ami de François Baroin. Le maire était à priori d'accord pour aider cette manifestation qui mettait sa ville à l'honneur, mais vu le plateau des organisateurs et participants, il s'est investi, et a accepté que la journée se déroule dans "Le Cube", le grand salon du palais des expositions.

L'exposition d'oeuvres d'art

L'exposition présentait des oeuvres de Gérard Garouste, que je n'aime pas personnellement, mais aussi d'Alain Kleinmann vous avez ici sa peinture-collage "mémoire d'une mélodie" ainsi que d'autres peintres.

On y a vu aussi une exposition de photos de synagogues extraordinaires, de David Abitbol à l'occasion de la parution de son livre "Les synagogues de l'exil"



Myriam Sitbon Mendel a montré des sculptures étonnantes, dont ce portrait d' "Esther" très raffiné et curieux, avec une sorte d'archet de violoniste qui lui traverse la tête.


On pouvait aussi apprécier des oeuvres de Franck Tordjmann, et de Flavie Vincent-petit, celle qui a réalisé le grand vitrail, dont le logo de la journée s'est inspiré.

Pour les plus petit, des jeux étaient organisés, et pour les gourmands, un immense buffet capable de rasasier l'assistance... près de 2000 personnes !

Les tables ronde

On dit que la culture, est ce qu'il nous reste quand on a tout oublié, et bien, j'avais pris des notes pour ces deux conférences, et je les ai égarées au tréfonds de mon téléphone portable... soit elles sont effacées, soit je suis le roi des schlemiles (Benêt-maladroit en Yiddish). J'ai retenu de grands efforts des conférenciers pour nous expliquer que le judaïsme médiéval a grandement influencé la France, et que la France a apporté énormément de choses au judaïsme. Les deux cultures se complètent. Le thème de la première conférence était "De Rachi à nos jours, le génie du Judaïsme". Il y avait, outre le Grand Rabbin de France qu'on ne présente pas, Isabelle Cohen, historienne qu'on peut écouter sur Akadem, auteure d'un livre sur Job "Un monde à réparer", Paule Henriette Lévy journaliste, rédactrice en chef de l'Arche, Ariel Tolédano, médecin et auteur de "La Médecine de Rachi". (Pout une approche humaniste des soins). On présume que Rachi était vigneron, car il était très compétent en viticulture, alors on peut le présumer médecin, car il connaissait toute la médecine de son temps.

La seconde table ronde, m'a surtout marqué par l'exposé très émouvant de Rachel Khan, née d'un père Gambien, et d'une mère juive d'origine polonaise. Cette personnalité issue du sport, du spectacle, de la politique et du monde associatif m'a ému en parlant de sa double identité africaine et juive, comment l'un enrichi l'autre, et combien il est difficile de se faire admettre comme on est par les uns et par les autres. Il y avait aussi Elie Korchia, le président du consistoire central, Guila Clara Kessous auteure du Grand livre de la psychologie positive, Julien Darmon qui pense que l’hébreu fait partie des sources de notre patrimoine culturel et spirituel à nous aussi les français.

Une cérémonie officielle, avec les autorités, dont Cécile Dindar, préfet de l'Aube qui ont su faire preuve d'humanité et d'humour, parfois improvisé, lorsque le maire s'est trompé sur l'épouse du Grand Rabbin de France... enfin François Barouin, nous a appris qu'un rond point de Troyes allait être nommé Abba Samoun, l'ancien rabbin de la ville, et un grand ami de mon papa dont le fils, Joël, est aujourd'hui président de la communauté juive locale.

Des spectacles

Entre les deux tables ronde, nous avons assisté un spectacle musical, "Le temps d'un violon" mis en scène par Steve Suissa, mais conçu, chanté et joué par Cécile Bens, qui à l'aide de son violon magique a retracé l'histoire contemporaine, du peuple juif. Beaucoup de chansons, beaucoup de musique, des photos et des films diffusés sur grand écran, le tout pour faire partager des émotions, des choses gaies et tristes. A mon âge, c'est une grande partie de ma vie qui a aussi défilé, vraiment, le violon transporte les âmes et aboli le temps.

En cloture, les organisateurs nous avaient préparé, en avant première, «Les adieux des magnifiques» un spectacle sûrement merveilleux de Michel Boujenah, mais nous avions une longue route à faire, et nous étions un peu fatigué, aussi, nous avons séché la scène, pour prendre un peu d'air dans les rues de Troyes, et la route en même temps. On a tout pris, ne cherchez plus, il n'y a plus rien.

Que faut-il retenir de tout cela ?

Les organisateurs ont été magnifiques, et j'espère que cette journée n'était pas leurs adieux, mais leur entrée en scène. Une première ! Une organisation sans faille, plus de trente autocars avaient déversé les visiteurs de toute la région parisienne, mais aussi de Lorraine et d'ailleurs. Près de deux mille visiteurs, le double du nombre ciblé à l'origine. Il faut dire qu'une bonne publicité avait été faite, et que l'entrée était symbolique, cinq euros, voyage compris pour l'entrée, les conférences et les spectacles.
Il faut donc remercier les généreux sponsors, en particulier les autorités locales, mairie, département, et région, ainsi que les divers institutions juives nationales.

Cette fête du judaïsme français a mis en avant le positionnement des dirigeants officiels de notre communauté, qui se voulait français de toujours. Il fallait le rappeler aux autorités présentes, maire, et préfet entre autres. Il fallait aussi rappeler aux membres des communautés juives, combien les valeurs de la République et du judaïsme sont proches et se complètent.

Il était nécessaire d'insister sur cet ancrage républicain, alors que les forces centrifuges tendent à éloigner de plus en plus de français de la nationalité. Les mouvements "wokistes", "décoloniaux", sionistes et autres font que la recherche d' origines, réelles, imaginaires, ou réinventées font que beaucoup de citoyens cultivent leurs identités multiples, et que les liens avec la république risquent de devenir confus.

Pour reprendre le thème si cher à Emmanuel Macon, "En même temps", nous sommes en même temps français et juifs, et c'est notre richesse.

Michel Lévy

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1) Parmi les fondateurs, il faut rendre hommage à des industriels en bonnetrie, ou des responsables travaillant dans le secteur, je pense à Albert Blum, Isidore Frank Forter, M Rosen, sans parler de ceux qui n'étaient pas eux même patrons mais qui avaient une bonne place dans le métier, Roger Kahn, M Gaston Caïn... ainsi que deux marchands de meubles concurrents et amis, Henri Cahen et Roger Lévy