Valse avec Bachir |
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Ari Forman se raconte, et raconte ses amis, avec une telle sincérité qu'on y croit. C'est un très beau film, un beau témoignage qui sent le vrai. Pourtant, à la fin du film, l'auteur se laisse emporter par ses idées, et décrit ce qu'il n'a pas vu. C'est normal, selon le psy on reconstruit le passé. Les témoignages sont tous bien fragiles.
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«Surpris de n'avoir plus aucun souvenir de la première guerre du Liban, Ari part à la rencontre de ses anciens camarades de guerre, et qui maintenant sont éparpillés dans le monde, c'est ainsi qu'Allo ciné présente ce film d'animation » Cette phrase recouvre bien mes sentiments, en 1982, ceux qui s'en souviennent, les plus de quinze ans à l'époque, ont plus de quarante ans... pour les autres c'est de l'archéologie ! Si bien que j'ai hésité sur l'endroit où ranger cet article. Est-ce du cinéma ? de l'histoire ? de l'actualité ? |
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Sur le plan cinématographique Le film Valse avec Bachir a eu un grand succès avant le festival de Cannes, mais est revenu bredouille sans une seule récompense. Israël devient un des rares pays a avoir un cinéma de qualité mondiale, cette quinzaine, deux films ont l'honneur des affiches parisiennes, Valse avec Bachir, Les 7 jours. Mais d'autres films ont eu un franc succès en 2008, par exemple La visite de la fanfare que Mivy a adoré, où les citroniers une excellente description des dégats que peut occasionner la sécuritite aigüe qui traumatise israéliens et palestiniens. Ces films ont été réalisés avec la coopération de sociétés européennes; et ces accords présentent de nombreux avantages.
Ari Folman utilise le dessin animé, d'abord par ce qu'il n'existait pas d'images d'archives; et aussi par ce que la même technique avait donné d'excellents résultats dans Persépolis, le film génial de Maryam Satrapi. L'animation est très bien rendue, on est même étonné du réalisme. Le personnage du film ressemble vraiment au réalisateur... et pour cause, c'est lui-même qui raconte son histoire.
La musique est efficace, ce sont des airs de danse occidentaux, des airs contemporains. Les jeunes filmés à Tel Aviv, dans les boîtes où on ignore tout du drame libanais pourraient être à New York, Berlin ou Madrid. L'Israël que fréquente Ari n'a aucun rapport avec le monde religieux de Jérusalem, ni avec le monde sépharade. Rien ne montre l'aspect oriental des Israéliens, qui les rend parfois si proche des Arabes. Pourtant celui qui met les pieds en Israël ne peut pas l'ignorer. Ari fait partie d'une minorité d'un pays patchwork, sa description des Israéliens est nécessairement incomplète. Le film se veut avant tout psychologique. L'homme veut oublier certaines choses, et la mémoire reconstruit. C'est un travail de psy que va faire Ari Forman auprès de ses anciens compagnons d'arme.
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Les soldats en guerre se comportent mal Le suspens commence dès les premières images, on voit des chiens sauvages, courir de plus en plus nombreux, partir pour tuer; mais ils ne tuent personne. Ces chiens qui terrorisent tous les passants vont se rassembler devant la maison d'Ari; qui a très peur. Ces chiens sont des fantômes, on l'oublie trop, mais les chiens sont aussi des victimes de la guerre. Les soldats tuent les chiens qui peuvent donner l'alarme. On voit Ari rencontrer un à un ses amis; qui tous ont oublié, et pourtant les souvenirs reviennent. La guerre n'est pas belle, on voit les soldats israéliens se comporter comme des soldats en campagne :
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Mais l'évocation la plus dure, se trouve à la fin du film, l'incompréhension des témoins devant le drame de Sabra et Chatila
Les soldats sont présents, ils voient les phalangistes, dont les intentions sont claires : ils aiguisent leurs couteaux. Cependant, l'armée israélienne laissent entrer ses alliés. Petit à petit, les soldats comprennent qu'il se passe quelque chose de terrible dans le camp. L'officier est choqué, il téléphone au Général Sharon, qui, lui, ne semble pas traumatisé. Le film montre les soldats israéliens éclairant la scène où se déroule les massacres, puis enfin, Ari et ses amis, n'y tenant plus, vont dans le camp pour se rendre compte, et à ce moment là, une jeep officielle de l'armée arrive. Les soldats, et l'officiel croisent un groupe de phallangistes conduisant des civils pour les vers une destination inconnue, alors il dit "C'est fini, tout le monde rentre à la maison". Les miliciens libanais partent tranquillement, d'un côté et les civils de l'autre. (Cette vision des choses ne correspond pas à ce que les informations de l'époque avaient constaté. ) Les soldats découvrent l'horreur du massacre; et le film se termine par les pleurs des survivantes au milieu des cadavres. |
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Ce film est discutable et indiscutable
Ari Forman avait 17 ans quand il est parti au Liban, il a été traumatisé par les malheurs de la guerre; et son témoignage, ainsi que ceux qu'il a collectés sentent le vrai. J'ai eu la chance de ne pas avoir fait la guerre, rien de ce qu'on nous montre ne semble excessif ou invraisemblable. Ari Forman n'était pas politisé, il ignorait le contexte libanais. Il ne savait pas pourquoi on l'avait emmené dans ce pays. Mais aujourd'hui il est adulte, il a lu les nombreux rapports écrits sur le sujet, et a ses propres opinions. Aussi sa description des évènements de Sabra et Chatila ne peut pas faire l'unanimité. Au début du film, Ari fait parler son ami psychanalyste, il montre à des enfants une photo truquée, où ils sont entourés par des choses et objets familiers. Les enfants n'ont jamais été là. Mais la mémoire les trompe, après avoir affirmé que cette photo ne leur rappelait rien, le lendemain, ils disaient le contraire, une mémoire trompeuse leur était revenue. Compte tenu des actualités de l'époque; et de la propagande qui a suivi, j'ai tendance à penser que la vision du rôle des soldats israéliens vu par Ari Forman procède du même processus, l'auteur s'identifie peut-être dans le rôle reconstitué qu'on veut lui faire jouer. Pour Ari, les officiels israéliens sont clairement complices du massacre, ils en semblent même les chefs d'orchestre, vu qu'ils laissent les acteurs entrer malgré leurs intentions évidentes, et qu'il leur suffit de siffler pour que cessent les massacres. Or, le cinéaste qui s'était contenté de témoignages qui sentaient le vécu, brode et décrit les phalangistes aiguisant leurs couteaux. Où a-t-il vu cela ? ? On sait que Sharon qui avait expulsé le gros des troupes d'Arafat, souhaitait désarmer les camps, qu'il en avait fait la demande à l'armée libanaise, qui, selon son habitude a toujours refusé de faire régner l'ordre chez elle, d'où sa requête auprès des phalangistes qui devaient simplement désarmer la milice. Comment l'auteur peut-il affirmer que les Israéliens étaient au courant des intentions criminelles des tueurs ? ? C'est une hypothèse, or ce film se veut un témoignage. Même si l'hypothèse correspondait à la vérité, Ari Forman n'aurait pas le droit de présenter un faux témoignage pour justifier ses certitudes. Par la suite il montre l'effroi et l'étonnement des soldats qui mettent un certain temps à comprendre ce qui se passe et qui réprouvent totalement le crime. Cette condamnation du massacre a été totale du côté du peuple israélien. Une immense manifestation réunissant près de 10 % de la population du pays a eu lieu plus tard à Tel Aviv pour condamner cette barbarie. |
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Sabra et Chatila dans leur contexte
Tous les réfugiés ont été intégrés à la société libanaise au bout de quelques années, sauf les Palestiniens qui sont massivement rejetés. Ils sont plus de 10 % du pays, et ils souffrent de discriminations, par exemple ils n'ont pas le droit de posséder de sol. «Le Liban avait en 1996 une population de 3,1 millions d’habitants, sans compter les 200000 à 300000 réfugiés palestiniens. ... www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/liban.htm » Ce refus d'intégration n'a pas changé, on peut lire dans l'Orient le jour du 5 juillet 2008 sous la plume d'Issa Goraiëb «Que les États-Unis soient soucieux surtout des intérêts d'Israël est une lapalissade. Une autre en est la catastrophe que serait pour le pays, en termes d'équilibre communautaire, l'implantation définitive des centaines de milliers de refugiés palestiniens qui y vivent. C'est oublier cependant, ou feindre d'oublier, que les Etats-Unis et Israël ne sont pas seuls à avoir porté atteinte à l'intégrité du Liban, que des pays tenus pour frères ont eux aussi nourri à son encontre des visées malsaines. » Le film n'a fait aucune allusion aux crimes commis par les Palestiniens, en particulier à celui de Dammour en 1976, où entre 300 et 750 civils ont été massacrés. Les phalangistes n'avaient pas que Bachir Gemayel à venger. Le souvenir du massacre des Arméniens, et de la Shoah faisait que les Israéliens croyaient les chrétiens du Liban menacés d'extermination. En fait, ceux du Sud s'étaient très largement ralliés aux israéliens. La suite de l'histoire a montré un retournement progressif au fur et à mesure que le Hezbollah prenait de la puissance; et qu'il devenait dangereux de se compromettre avec "l'ennemi" sioniste. Si un compromis historique entre chrétiens du Sud Liban et Chiites a été signé par le Général Aoun, cet accord se fait sur le dos des Palestiniens et d'Israël. Les Palestiniens sont priés de rester dans leurs camps jusqu'au jour où on pourra les réexpédier manu-militari de l'autre côté de la frontière. Le général Aoun, sur ce point est en phase avec Cheik Nassrala. Michel Lévy |
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