Journal 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016, 2017, 2018, 2020, 2021, 2022, 2023
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13-Aoû-2023
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Le Midi Libre Publié le 06/07/2023 (D'après Le Monde)
Une synthèse du parquet général de Versailles, à laquelle Le Monde a eu accès, retrace les faits et les propos prononcés ce 27 juin, lors du drame de Nanterre.
Huit jours après la mort de Nahel, la cour d’appel de Versailles a décidé jeudi 6 juillet du maintien en détention provisoire du policier auteur du tir sur cet adolescent de 17 ans, lors d’un refus d’obtempérer à Nanterre (Hauts-de-Seine).
L’enquête menée autour de ce drame qui a embrasé la France progresse à la lumière des témoignages recueillis par l’IGPN, la police des polices.
Des faits synthétisés dans un réquisitoire du parquet général de Versailles, daté du 5 juillet, auquel le journal Le Monde a eu accès.
D’après les déclarations du brigadier mis en cause pour homicide volontaire, tout commence, ce 27 juin, lorsqu’il remarque "une Mercedes dont le moteur vrombissait et qui circulait dans la voie de bus".
Le motard rattrape le véhicule dans la circulation et lui fait signe de se ranger sur le côté.
"Mais celui-ci, relate le réquisitoire, avait alors accéléré brusquement et pris la fuite. Poursuivi par les deux motards, il avait conduit à vitesse élevée avec de brusques accélérations, des franchissements de feux rouges fixes et passages de carrefours "à pleine vitesse” et sans précaution pour les piétons… Il avait même fait une embardée volontaire vers son collègue qui était venu se mettre à son niveau."
Les images de vidéosurveillance montrent aussi que la berline roule parfois à contresens et a "failli percuter un cycliste tandis qu’un piéton engagé sur un passage protégé avait dû faire demi-tour en courant pour éviter d’être percuté".
La Mercedes finit par être bloquée dans le flot de la circulation. Les deux policiers approchent alors du véhicule, arme au poing.
Un gardien de la paix se positionne du côté de la vitre conducteur, le brigadier face à au pare-brise, comme le montrera une vidéo amateur devenue virale. Le brigadier dit ensuite avoir cogné contre le pare-brise pour "attirer l’attention du conducteur", alors que l’un des deux passagers affirme que des coups de crosse ont été portés contre Nahel.
Les enquêteurs reconstituent ensuite ainsi les échanges dans le document relayé par Le Monde : "Au début de la séquence, on entend un échange entre trois voix différentes (V1, V2, V3) avant la détonation, que nous interprétons comme suit :
V1 : "… une balle dans la tête"
V2 : "Coupe ! Coupe !"
V3 : "Pousse-toi !"
V1 : “Tu vas prendre une balle dans la tête” (propos pouvant être attribués au gardien de la paix qui agite son bras droit au même moment).
V2 : "Coupe !"
Le coup de feu est tiré, immédiatement suivi de cinq ou six coups de klaxons et du vrombissement du moteur de la voiture de location.
Ces éléments semblent donc montrer que c’est le gardien de la paix, et non le brigadier mis en cause dans la mort de l’automobiliste, qui aurait crié quelques instants avant le tir : "Tu vas prendre une balle dans la tête."
Le brigadier affirme que "son objectif initial n’avait pas été de tirer", tout en expliquant qu’il n’a pas voulu "viser le haut du corps mais le bas".
Parmi les autres enquêtes en lien avec des interventions de la police, deux affaires interrogent. En Meurthe-et-Moselle, Aimène Bahouh, 25 ans, qui se déplaçait en voiture à Mont-Saint-Martin, après sa journée de travail, dans la nuit de jeudi à vendredi dernier, a reçu un probable tir de "bean bag" dans la tempe, un type de munition utilisé par le Raid. Il est dans le coma. À Angoulême, Alhoussein Camara, un Guinéen de 19 ans, se rendait à son travail, le 14 juin vers 4 h du matin, lorsqu’il a été tué par la police lors d’un contrôle routier.
Le policier assure qu’il s’est "retrouvé acculé contre le trottoir et le muret situé derrière lui", et a "immédiatement pensé que le conducteur allait accélérer alors que pour lui, à cet instant précis, son collègue se trouvait toujours dans l’habitacle".
Alors que son collègue, qui semblait dans son champ de vision, a confirmé que seul son bras l’était.
Des interrogations demeurent. Et notamment celle-ci : pourquoi l’opérateur de la police a signalé, dans une fiche de résumé d’intervention Pegase, que "le conducteur a essayé de repartir en fonçant sur le fonctionnaire" ? Ce que démentira formellement la vidéo.
Sur le plan sécuritaire, "on est revenu à peu près à une situation normale", même si le gouvernement reste "vigilant", a souligné jeudi la Première ministre, Élisabeth Borne, en déplacement à Lisieux (Calvados). "On va préparer un dispositif de maintien de l’ordre pour les 13 et 14 juillet", a-t-elle précisé, évoquant, notamment, des "actions préventives" concernant les mortiers d’artifice utilisés contre la police. En région parisienne, les forces de l’ordre en ont déjà saisi 1,5 tonne ces derniers jours selon BFMTV. La police aux frontières et les douanes sont "très mobilisées pour éviter les transports vers notre territoire de ces matériels dangereux", a expliqué Élisabeth Borne. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a également donné, précise-t-il, "des instructions de fermeté aux préfets afin de renforcer la lutte contre les mortiers et plus largement tous les objets pyrotechniques".
Tom Kerkour sur BFM TV
Le jeune homme de 17 ans est mort mardi lors d'un contrôle routier. Inscrit en CAP électricité, il gagnait sa vie en tant que livreur.
Nahel M., 17 ans, a été tué mardi lors d'un contrôle routier à Nanterre, atteint au cœur par le tir mortel d'un policier qui a depuis été placé en garde à vue. Deux enquêtes ont depuis été ouvertes. Selon la version des membres des forces de l'ordre, les agents auraient été contraints d'ouvrir le feu après un refus d'obtempérer, mais une vidéo partagée sur les réseaux sociaux remet en cause ce scénario.
Ce "gamin de quartier" avait "la volonté de s'insérer socialement et professionnellement, (ce n'était) pas un gamin qui vivait du deal ou se complaisait dans la petite délinquance", a confié au Parisien Jeff Puech, le président d’un club associatif où jouait au rugby Nahel.
Fils unique, Nahel a été élevé par sa seule mère dans le quartier du Vieux-Pont à Nanterre, relate le Parisien. Selon nos informations, Le jeune homme était inscrit depuis 2021 au lycée Louis Blériot à Suresnes, dans les Hauts-de-Seine, en CAP électricité. Le jeune homme avait un profil d'élève absentéiste et gagnait ces derniers temps sa vie en tant que livreur.
Depuis l'annonce de sa mort, des hommages similaires se sont multipliés. Selon ses avocats, Nahel M. était "très aimé" dans son quartier. Sa grand-mère Nadia a rappelé avec émotion qu'il n'avait "que 17 ans" et a peint le portrait d'un "gentil et bon garçon".
Dans une vidéo partagée sur les réseaux sociaux, sa mère Mounia réagissait difficilement à la nouvelle, louant une relation fusionnelle:
"Ce (mardi) matin, il m’a fait un gros bisou, il m’a dit: 'Maman je t’aime'. Je lui ai dit: 'Je t’aime, fais attention à toi'. Une heure après, on me dit quoi? Qu’on a tiré sur mon fils. Je vais faire quoi? C’était ma vie, c’était mon meilleur ami, c’était mon fils, c’était tout pour moi. On était complices comme pas possible."
Les avocats de Nahel M. martèlent que son casier judiciaire était vierge. Ce qui ne signifie pas qu'il n'a jamais eu affaire aux services de police ou à la justice. Selon les informations confiées par une source proche de l'enquête à BFMTV, des faits le concernant sont inscrits au fichier TAJ, le traitement d'antécédents judiciaires.
Ce système est complètement différent du casier judiciaire, puisqu'y sont inscrites tant les victimes que les mis en cause. Par ailleurs, une personne peut-être inscrite au TAJ même sans poursuite sur le plan pénal, ou lors d'un classement sans suite.
"Mon client avait 17 ans, il travaillait, il était livreur et il a été abattu aujourd’hui", voilà ce qu’on sait avec certitude", a rétorqué l'avocat de la famille, Yassine Bouzrou, sur BFMTV mardi.
"Être connu des services de police, ça ne veut absolument rien dire", a insisté le conseil. (…) "Ces fichiers (de police) manquent de précision."
En septembre 2022, le jeune homme a été présenté à un juge des enfants pour un refus d'obtempérer qui datait de janvier de la même année, selon une source proche de l'enquête. La justice avait alors prononcé une mesure éducative.
Un autre événement est noté, un incident très récent, puisqu'il s'est déroulé le week-end dernier. La victime a été placée en garde à vue samedi, là encore pour un refus d'obtempérer. Il avait été déféré dimanche devant le procureur qui lui avait notifié une convocation devant le tribunal pour enfants pour septembre 2023.
Les proches de Nahel ont appelé à une marche blanche jeudi à 14 heures devant la préfecture de Nanterre. Sa mère demande aussi une "marche de révolte", au lendemain d'une nuit de vives tensions.
Tom Kerkour
Ambre Lepoivre dans le Figaro le 29 juin 2023
Nahel était un garçon connu des services de police. Malgré son jeune âge, l'adolescent de 17 ans, tué lors d'un contrôle routier mardi 27 juin, n'en était pas à son premier coup d'essai.
L'adolescent, au volant ce jour-là d'une Mercedes immatriculée avec une plaque polonaise, qu'il conduisait sans permis, avait déjà fait l'objet de douze interpellations pour des délits divers, selon des sources concordantes.
Au traitement des antécédents judiciaires, son nom était rattaché à quatre refus d'obtempérer. Certains ont été classés sans suite, un autre a débouché sur la mise en place d'une mesure éducative prononcée par un juge des enfants, d'après Europe 1. Enfin, son dernier refus d'obtempérer - le quatrième, avant le drame - remonte au 24 juin. Nahel avait alors été placé en garde à vue et devait comparaître devant le tribunal des enfants en septembre prochain. Ce qui ne l'a pas empêché de recommencer trois jours plus tard.
Le jeune homme était aussi connu pour conduite sans permis, sans assurance…
Christiane Taubira dans "Le Monde" 21 juillet 2023
Journal 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016, 2017, 2018, 2020, 2021, 2022, 2023
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27-Sep-2023
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Le Midi Libre Publié le 06/07/2023 (D'après Le Monde)
Une synthèse du parquet général de Versailles, à laquelle Le Monde a eu accès, retrace les faits et les propos prononcés ce 27 juin, lors du drame de Nanterre.
Huit jours après la mort de Nahel, la cour d’appel de Versailles a décidé jeudi 6 juillet du maintien en détention provisoire du policier auteur du tir sur cet adolescent de 17 ans, lors d’un refus d’obtempérer à Nanterre (Hauts-de-Seine).
L’enquête menée autour de ce drame qui a embrasé la France progresse à la lumière des témoignages recueillis par l’IGPN, la police des polices.
Des faits synthétisés dans un réquisitoire du parquet général de Versailles, daté du 5 juillet, auquel le journal Le Monde a eu accès.
D’après les déclarations du brigadier mis en cause pour homicide volontaire, tout commence, ce 27 juin, lorsqu’il remarque "une Mercedes dont le moteur vrombissait et qui circulait dans la voie de bus".
Le motard rattrape le véhicule dans la circulation et lui fait signe de se ranger sur le côté.
"Mais celui-ci, relate le réquisitoire, avait alors accéléré brusquement et pris la fuite. Poursuivi par les deux motards, il avait conduit à vitesse élevée avec de brusques accélérations, des franchissements de feux rouges fixes et passages de carrefours "à pleine vitesse” et sans précaution pour les piétons… Il avait même fait une embardée volontaire vers son collègue qui était venu se mettre à son niveau."
Les images de vidéosurveillance montrent aussi que la berline roule parfois à contresens et a "failli percuter un cycliste tandis qu’un piéton engagé sur un passage protégé avait dû faire demi-tour en courant pour éviter d’être percuté".
La Mercedes finit par être bloquée dans le flot de la circulation. Les deux policiers approchent alors du véhicule, arme au poing.
Un gardien de la paix se positionne du côté de la vitre conducteur, le brigadier face à au pare-brise, comme le montrera une vidéo amateur devenue virale. Le brigadier dit ensuite avoir cogné contre le pare-brise pour "attirer l’attention du conducteur", alors que l’un des deux passagers affirme que des coups de crosse ont été portés contre Nahel.
Les enquêteurs reconstituent ensuite ainsi les échanges dans le document relayé par Le Monde : "Au début de la séquence, on entend un échange entre trois voix différentes (V1, V2, V3) avant la détonation, que nous interprétons comme suit :
V1 : "… une balle dans la tête"
V2 : "Coupe ! Coupe !"
V3 : "Pousse-toi !"
V1 : “Tu vas prendre une balle dans la tête” (propos pouvant être attribués au gardien de la paix qui agite son bras droit au même moment).
V2 : "Coupe !"
Le coup de feu est tiré, immédiatement suivi de cinq ou six coups de klaxons et du vrombissement du moteur de la voiture de location.
Ces éléments semblent donc montrer que c’est le gardien de la paix, et non le brigadier mis en cause dans la mort de l’automobiliste, qui aurait crié quelques instants avant le tir : "Tu vas prendre une balle dans la tête."
Le brigadier affirme que "son objectif initial n’avait pas été de tirer", tout en expliquant qu’il n’a pas voulu "viser le haut du corps mais le bas".
Parmi les autres enquêtes en lien avec des interventions de la police, deux affaires interrogent. En Meurthe-et-Moselle, Aimène Bahouh, 25 ans, qui se déplaçait en voiture à Mont-Saint-Martin, après sa journée de travail, dans la nuit de jeudi à vendredi dernier, a reçu un probable tir de "bean bag" dans la tempe, un type de munition utilisé par le Raid. Il est dans le coma. À Angoulême, Alhoussein Camara, un Guinéen de 19 ans, se rendait à son travail, le 14 juin vers 4 h du matin, lorsqu’il a été tué par la police lors d’un contrôle routier.
Le policier assure qu’il s’est "retrouvé acculé contre le trottoir et le muret situé derrière lui", et a "immédiatement pensé que le conducteur allait accélérer alors que pour lui, à cet instant précis, son collègue se trouvait toujours dans l’habitacle".
Alors que son collègue, qui semblait dans son champ de vision, a confirmé que seul son bras l’était.
Des interrogations demeurent. Et notamment celle-ci : pourquoi l’opérateur de la police a signalé, dans une fiche de résumé d’intervention Pegase, que "le conducteur a essayé de repartir en fonçant sur le fonctionnaire" ? Ce que démentira formellement la vidéo.
Sur le plan sécuritaire, "on est revenu à peu près à une situation normale", même si le gouvernement reste "vigilant", a souligné jeudi la Première ministre, Élisabeth Borne, en déplacement à Lisieux (Calvados). "On va préparer un dispositif de maintien de l’ordre pour les 13 et 14 juillet", a-t-elle précisé, évoquant, notamment, des "actions préventives" concernant les mortiers d’artifice utilisés contre la police. En région parisienne, les forces de l’ordre en ont déjà saisi 1,5 tonne ces derniers jours selon BFMTV. La police aux frontières et les douanes sont "très mobilisées pour éviter les transports vers notre territoire de ces matériels dangereux", a expliqué Élisabeth Borne. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a également donné, précise-t-il, "des instructions de fermeté aux préfets afin de renforcer la lutte contre les mortiers et plus largement tous les objets pyrotechniques".
Tom Kerkour sur BFM TV
Le jeune homme de 17 ans est mort mardi lors d'un contrôle routier. Inscrit en CAP électricité, il gagnait sa vie en tant que livreur.
Nahel M., 17 ans, a été tué mardi lors d'un contrôle routier à Nanterre, atteint au cœur par le tir mortel d'un policier qui a depuis été placé en garde à vue. Deux enquêtes ont depuis été ouvertes. Selon la version des membres des forces de l'ordre, les agents auraient été contraints d'ouvrir le feu après un refus d'obtempérer, mais une vidéo partagée sur les réseaux sociaux remet en cause ce scénario.
Ce "gamin de quartier" avait "la volonté de s'insérer socialement et professionnellement, (ce n'était) pas un gamin qui vivait du deal ou se complaisait dans la petite délinquance", a confié au Parisien Jeff Puech, le président d’un club associatif où jouait au rugby Nahel.
Fils unique, Nahel a été élevé par sa seule mère dans le quartier du Vieux-Pont à Nanterre, relate le Parisien. Selon nos informations, Le jeune homme était inscrit depuis 2021 au lycée Louis Blériot à Suresnes, dans les Hauts-de-Seine, en CAP électricité. Le jeune homme avait un profil d'élève absentéiste et gagnait ces derniers temps sa vie en tant que livreur.
Depuis l'annonce de sa mort, des hommages similaires se sont multipliés. Selon ses avocats, Nahel M. était "très aimé" dans son quartier. Sa grand-mère Nadia a rappelé avec émotion qu'il n'avait "que 17 ans" et a peint le portrait d'un "gentil et bon garçon".
Dans une vidéo partagée sur les réseaux sociaux, sa mère Mounia réagissait difficilement à la nouvelle, louant une relation fusionnelle:
"Ce (mardi) matin, il m’a fait un gros bisou, il m’a dit: 'Maman je t’aime'. Je lui ai dit: 'Je t’aime, fais attention à toi'. Une heure après, on me dit quoi? Qu’on a tiré sur mon fils. Je vais faire quoi? C’était ma vie, c’était mon meilleur ami, c’était mon fils, c’était tout pour moi. On était complices comme pas possible."
Les avocats de Nahel M. martèlent que son casier judiciaire était vierge. Ce qui ne signifie pas qu'il n'a jamais eu affaire aux services de police ou à la justice. Selon les informations confiées par une source proche de l'enquête à BFMTV, des faits le concernant sont inscrits au fichier TAJ, le traitement d'antécédents judiciaires.
Ce système est complètement différent du casier judiciaire, puisqu'y sont inscrites tant les victimes que les mis en cause. Par ailleurs, une personne peut-être inscrite au TAJ même sans poursuite sur le plan pénal, ou lors d'un classement sans suite.
"Mon client avait 17 ans, il travaillait, il était livreur et il a été abattu aujourd’hui", voilà ce qu’on sait avec certitude", a rétorqué l'avocat de la famille, Yassine Bouzrou, sur BFMTV mardi.
"Être connu des services de police, ça ne veut absolument rien dire", a insisté le conseil. (…) "Ces fichiers (de police) manquent de précision."
En septembre 2022, le jeune homme a été présenté à un juge des enfants pour un refus d'obtempérer qui datait de janvier de la même année, selon une source proche de l'enquête. La justice avait alors prononcé une mesure éducative.
Un autre événement est noté, un incident très récent, puisqu'il s'est déroulé le week-end dernier. La victime a été placée en garde à vue samedi, là encore pour un refus d'obtempérer. Il avait été déféré dimanche devant le procureur qui lui avait notifié une convocation devant le tribunal pour enfants pour septembre 2023.
Les proches de Nahel ont appelé à une marche blanche jeudi à 14 heures devant la préfecture de Nanterre. Sa mère demande aussi une "marche de révolte", au lendemain d'une nuit de vives tensions.
Tom Kerkour
Ambre Lepoivre dans le Figaro le 29 juin 2023
Nahel était un garçon connu des services de police. Malgré son jeune âge, l'adolescent de 17 ans, tué lors d'un contrôle routier mardi 27 juin, n'en était pas à son premier coup d'essai.
L'adolescent, au volant ce jour-là d'une Mercedes immatriculée avec une plaque polonaise, qu'il conduisait sans permis, avait déjà fait l'objet de douze interpellations pour des délits divers, selon des sources concordantes.
Au traitement des antécédents judiciaires, son nom était rattaché à quatre refus d'obtempérer. Certains ont été classés sans suite, un autre a débouché sur la mise en place d'une mesure éducative prononcée par un juge des enfants, d'après Europe 1. Enfin, son dernier refus d'obtempérer - le quatrième, avant le drame - remonte au 24 juin. Nahel avait alors été placé en garde à vue et devait comparaître devant le tribunal des enfants en septembre prochain. Ce qui ne l'a pas empêché de recommencer trois jours plus tard.
Le jeune homme était aussi connu pour conduite sans permis, sans assurance…
Christiane Taubira dans "Le Monde" 21 juillet 2023
La mort de Nahel M. a été suivie de postures politiciennes déplorables à propos de la police, juge l’ancienChristiane Taubira. Que devient un pays où la mort d'un adolescent réveille de meprisables pulsions de réjouissance ?
Nous sommes passés à autre chose Croient-ils. Une exéccution pour refus d’obtempérer. Des déclarations officielles trafiquées. Des larmes. Des vidéos. Des révoltes. Des tribunes, Des larmes. Des marches. Des provocs De part et d’autre. Des larmes. De la rage. Un de plus. Jusqu'à quand ? Des menaces martiales depuis perrons et parvis. Des phrases en cafouillis. Des mots rouilles dans des communiqués de syndicats réacs et vulgaires. Des mots de miel pour les maires. Des plans pour la ville. Des budgets pour rafistoler. Récré Diversion. Routine Circulez! C'est le tempo d’un scénario qui a déjà quarante ans d'âge. Et encore, c'est depuis peu qu’il existe des vidéos.
Nahel M ent mort. Pour de bon, Pour de vrai et pour toujours. Il ne va plus rentier à la maison. Il n'avancera pas à pas de loup sur la pointe des pieds pour poser par surprise ses doigts écartés sur les yeux de sa maman qui fera semblant de ne pas savoir que c'est lui. Il ne fera plus claquer la porte d’entrée, ne laissera plus traîner ses chaussettes qui schlinguent, ne rincera plus son assiette à la va-vite en y laissant des traces de gras. Qu’importe s’il ne faisait rien de tout cela. Nahel a su qu’il mourait, parce qu'à 17 ans, Lorsqu'on vit en banlieue, on apprend vite que la mort peut surgir ainsi. Tl a compris qu'il mourait sans une main tendre, sans un regard compatissant perlé de larmes, sans une étreinte qui cherche à transformer la détresse en courage. Nahel est mort.
A tel point que des chefs d'entreprise pétitionnent pour ne pas cautionner l'aggravation des inégalités. Déjà, en 2004, avant Zyed et Bouna, des patrons avaient eu clairvoyance et volonté. Ils pensaient que le pays dépérissait, non, pas vraiment, plutôt qu'il s’appauvrissait, et risquait quand meme de dépérir un peu, s’il continuait à discriminer, exclure, insulter et maltraiter sa jeunesse des banlieues. Ils étaient une poignée à prendre l'ini tiative, quelques dizaines à la consoli der, bientôt plusieurs milliers à s'engager. Ce fut la Charte de la diversité. Près de vingt ans plus tard, des pédegères et toutes sortes d’employeurs. Lucides et volontaires, font tribune à leur tour...
D'autres se déchaînent et se défoulent. Que devient un pays où la mort d'un adolescent réveille de méprisables pulsions de réjouissance? Vers quelle déraison se fourvoie-t-il ? A quels effondrements se prépare t-ïl ?
J'ai souvenir de visages juvéniles, que je devinais beaux, et qui rosissaient, dé figurés par la haine et le rejet du mariage pour tous. Je revois des lèvres révulsées de fureur, j’entends encore ces voix déformées par des mots délabrés; «Fous l'camp chez toi! Macaque! Dégage!» Un soir, il y eut des traces d’œuf sur mon manteau. Un autre, le préfet m’a poussée avec brutalité dans une voiture. J'entendis aussitôt le bruit sourd d'un objet lourd sur le sol, à quelques pas. La police était partout, tout le temps. Pas un instant je n’ai pas pense que l’un de ces jeunes pouvait mourir, brutalement. Ou être éborgné.
Une fois, dans une gare de Paris bondée de protestataires hystériques, le major de mes officiers de sécurité m’a chuchoté ; «Je vais peut-être devoir vous plaquer au sol. » La police était massive ment déployée, en rangs serrés. Les cris fusaient, les bras voltigeaient, de petits groupes venaient bruyamment à l’assaut Aucun ne fut même égratigne. La preuve qu’une autre doctrine de maintien de l’ordre est possible. Per- sonne n’imaginait ni dans la foule hostile et survoltée ni alentour, qu’un de ces jeunes pouvait mourir brutalement. Et si l'idée m’en était venue, j’aurais pensé comme aujourd’hui «Non! C’est trop injuste. Personne n’a le pouvoir de lui ôter la vie. Il avait le droit de grandir, de comprendre, de changer, de devenir raisonnable, voire généreux. Et tant pis s’il devait empirer et finir en vieux ton caduc âgé et usagé des neiges d'antan, buté, indécrottable. Mais qu’il vive sa vie.»
Je tiens pour monstres ceux qui sont capables de se réjouir de la mort brutale d’un adolescent. Je tiens pour fourbes et perfides ces saintes nitouches qui font mine d’interroger un improbable casier judiciaire encore que, à force de contrôles intempestifs, un outrage à agent guette toujours derrière une énième vérification d'identité - et qui, ainsi, subrepticement, valident une peine de mort sans jugement. Une exécution sommaire. Arbitraire, Extra judiciaire.
Qu'est-ce qui couve dans un pays où l’on peut dire à voix haute qu'un policier qui a tué tin adolescent désarmé, assis dans une voiture, a fait son travail ? Qu'advient-il d'un pays où tuer un adolescent, dont les deux mains sont visibles sur un volant, peut constituer le « travail » de la police?
El il manquait cela dans l’abjection: une cagnotte lancée par l’extrême droite. Une grande bamboche à pognon. Du grisbi. Du flouze. Du pèze Une foire à fric. Une soupe de tune. En veux-tu en voilà. Le rictus odieux, le ricanement rauque et glauque au-dessus du corps sans vie d’un adolescent. Le pognon, son odeur de soufre dans la provocation, les émanations fétides des valeurs qui se décomposent, dignité et décence en putréfaction L’oseille et son haleine frelatée postillonnéc sur nos visages.
Pourtant, déjà, le ministre a légèrement aplati les motifs réglementaires pour maintenir le salaire du fonctionnaire tireur. Que devient un pays où la mort d’un adolescent sert des postures politiciennes ? Il est aussi absurde et puéril de proclamer qu’on aime la police que de la détester. Ce n'est pas une question d’affect. C’est une question éthique. Au sens où S'entendait Paul Ricneur: «Le souci de in vie bonne, avec et pour les autres, dans des institutions justes. »
C’est une question démocratique. C’est pour le respect et la garantie de nos droits et libertés qu’est instaurée une force publique, qu'une violence légale lui est octroyée par le contrat social, et que la légitimité de cette violence doit se vérifier en chaque circonstance, à chaque présomption d'abus.
On ne peut faire comme si l'attirance pour l'uniforme et les armes, dans un service public dont les agents actifs ont voté à 67 % pour le Rassemblement national au premier tour de la présidentielle en 2022, ne signifiait rien. Comme si ce n'était qu'une statistique sans abîme, une bulle de savon.
De môme qu’on ne peut désavouer et abandonner celles et ceux qui, au sein de l’institution, continuent à croire en ses missions, connaissent la grandeur constitutionnelle de leur fonction et en acceptent les servitudes, y sont entrés pour servir, gardent la tête froide et restent professionnels, risquent parfois leur vie, et continuent à prendre au sérieux des mots tels que «citoyenneté indivisible », « cohésion », « justice ».
Les déclarations d’amour tonitruantes proférées dans des lieux officiels sont immatures et grotesques. On attend des dirigeants politiques qu’ils soient clairs et responsables sur les doctrines d'ordre public, d’intervention et de risque, et sur l’usage des armes; qu’ils octroient aux fonctionnaires, toutes administrations confondues, donc y compris à la police, les moyens d’accomplir leurs missions au service de toutes et tous; qu'ils veillent à des formations performantes, au renouvellement des équipements obsolètes; qu'ils évitent l’accumulation explosive des heures supplémentaires et qu’ils règlent celles qui sont dues; qu’ils rappellent les valeurs républicaines et assument les rigueurs de leur charge au lieu de jouer à la queue leu leu avec les syndicats réac tionnaires. Qu’ils soient vis-à-vis d’eux-memes exigeants et exemplaires, Assurément, tes obligations ne vont pas de pair avec un vocabulaire dépenaillé et des rodomontades de chefs de gang. On n'attend pas d'eux qu'ils se défaussent sur les syndicats pour que soient définies sous biais corporatiste et doctrinaire les conditions d'exercice de nos libertés.
Non, nous ne sommes pas passés à autre chose. Nous ne pouvons. Dans cinquante ans, il sera encore d'actualité de parler de la mort de Nahel, de la police, de la justice. Soit parce qu’il y aura eu d’autres Nahel, Soit parce que, enfin, des dirigeants politiques lucides, courageux et responsables auront résolument engagé des politiques et des actions aussi bien pour une égalité civique réelle en tous lieux du terri toire que pour la cohésion sociale et nationale. Ils auront cesse de vider les banlieues de leurs éducateurs, leurs bibliothèques, leurs ciné-clubs, leurs théâtres de quartier, leurs centres de soins, leurs commissariats. Il faudra qu'ils aient renoncé à complaire à l’extrême droite, à donner des gages à ses mentors, à entretenir des compérages avec ses relais médiatiques, à promou voir ses gourous.
Notre époque apparaîtra alors pour ce q u 'elle est : une pa renthèse, trop longue, de l’art français - pas si vieux - de faire commun à partir de tout, « sans distinction de...», comme le dit la Constitution. C'est cela, la chose. Nous ne pouvons donc encore passer à autre chose. ■
Christiane Taubira a été ministre de la justice de 2012 à 2016
La mère de Nahel a vu des militants d’extrême droite remettre en cause la sincérité de son deuil. Mais il existe une multitude de manières de réagir face à la perte d’un proche, soulignent deux spécialistes du sujet.
PSYCHOLOGIE - Elle devrait paraître « triste », voire « effondrée »… Suite à la mort de Nahel, abattu à bout portant par un policier lors d’un contrôle routier mardi 27 juin dernier, à Nanterre, sa mère Mounia M. a été prise pour cible sur les réseaux sociaux par une partie de l’extrême droite, remettant en doute la sincérité de son deuil.
En cause, selon ces sympathisants ? Son attitude, lors de la marche blanche en hommage à son fils, organisée jeudi 29 juin, ne serait pas celle qu’on attend d’une mère qui vient de perdre un enfant. Si celle qui a inhumé son fils ce samedi au cimetière du Mont-Valérien s’est montrée très émue et touchée, elle a également affiché des sourires, saluant et remerciant la foule venue la soutenir, tout en réclamant justice pour Nahel.
Pourtant, cette attitude n’est « pas du tout étonnante », confie au HuffPost Marie-Frédérique Bacqué, une psychologue clinicienne, professeure en psychopathologie clinique à l’Université de Strasbourg et spécialiste du deuil. « C’est une attitude que l’on peut retrouver suite à une perte brutale. Le deuil d’un enfant est toujours extrêmement difficile. Il y a une situation d’incrédulité qui peut durer de quelques heures à quelques jours. »
« En général, quand on apprend une telle nouvelle, on n’y croit pas dans un premier temps. Il faut un certain temps pour intégrer l’information qui remet en cause, dans le cas de la mère de Nahel, 18 ans d’existence. Le problème est d’accepter la réalité de la mort. Et dans la majorité des cas, on l’accepte quand on voit le corps du défunt », complète-t-elle.
Alain Sauteraud,psychiatre spécialiste du sujet et auteur du livre Vivre après ta mort : Psychologie du deuil (ed. Odile Jacob), rappelle qu’il existe « une infinité de deuils différents » : « Il y a un décès par minute en France, et pourtant, il n’y a pas deux deuils identiques. Il n’y a pas de logiciel. Aux mêmes obsèques (celles de Nahel auront lieu ce samedi 1er juillet, ndlr), on voit des gens qui ont des émotions très différentes. »
La manière dont on réagit face à la perte d’un proche dépend d’une multitude de facteurs : de la relation et de l’histoire que l’on entretient avec le défunt, de son âge, des circonstances de sa mort… Même si certains sentiments peuvent prendre le pas sur les autres.
Dans les cas des décès attendus, celui qui domine est plutôt le soulagement, « lié au fait que la personne ne souffre plus ». Si la mort est brutale, la personne endeuillée est confrontée au choc. Et dans le cas de la perte d’un enfant, « c’est un état de sidération qui prédomine ».
« Il y a un mélange de sentiments très divers qui se succèdent et se chevauchent dès l’annonce de la mort. La tristesse, évidemment, mais aussi, l’angoisse, la colère… » Colère qui peut prendre le dessus dans les cas de décès qui semblent particulièrement injustes.
Et ne pas se montrer triste ne veut pas dire qu’on ne l’est pas. Plusieurs émotions sont présentes simultanément, mais le cerveau est pris par celle qui domine. « Le symptôme spécifique du deuil, ce n’est ni la tristesse, ni l’effondrement », explique le psychiatre. « C’est l’état de manque. Suite à une mort traumatique, il n’est pas forcément au premier plan. Il est caché. »
Selon Marie-Frédérique Bacqué, la situation dans laquelle se trouve la mère de Nahel, qui est au centre de l’attention, ne l’aide pas à accéder au deuil. « Elle est portée par une foule qui la soutient, qui lui transmet que la mort de son fils est révoltante. Quand on n’a pas la possibilité de se recueillir entre proches, ça peut prendre beaucoup de temps pour accéder à des sentiments de tristesse », estime-t-elle.
Son attitude se retrouve parfois chez les mères de soldats, selon la chercheuse, qui mettent de côté la douleur et le chagrin pour exprimer leur colère ou leur sentiment d’injustice lorsque la guerre a emporté leur enfant.
Quant au rire, il n’est pas forcément associé à la joie. Il peut être une défense psychique inconsciente, comme on peut l’observer lors de certains enterrements, mais aussi le signe de l’excitation de groupe, d’une tension… « Inconsciemment, la mère de Nahel peut sembler joyeuse et portée par le mouvement », analyse la chercheuse avant d’estimer : « Mais elle doit vivre quelque chose d’extrêmement stressant. »
Le Figaro avec AFP Publié le 21/07/2023
Les policiers sont soupçonnés d’avoir roué de coups un jeune homme de 21 ans dans le centre de Marseille pendant une nuit d’émeutes.
Ils sont soupçonnés d'avoir roué de coups un jeune homme à Marseille en marge des émeutes ayant embrasé la France début juillet : quatre policiers ont été mis en examen et l'un d'eux placé en détention provisoire, suscitant la colère des syndicats.
Les quatre fonctionnaires, deux membres de la brigade anticriminalité (Bac) Sud et deux de la BAC centre, ont été mis en examen dans la nuit de jeudi à vendredi pour violences en réunion par personne dépositaire de l'autorité publique avec usage ou menace d'une arme ayant entraîné une ITT (incapacité totale de travail) supérieure à 8 jours.
Dans la nuit du 1er au 2 juillet, alors que le centre de Marseille était en proie aux violentes émeutes qui avaient suivi la mort de Nahel, un adolescent de 17 ans tué par un policier à Nanterre lors d'un contrôle routier, ils auraient passé à tabac un jeune de 21 ans. Sur son lit d'hôpital, quelques jours après les faits, Hedi avait affirmé au quotidien La Provence avoir reçu un tir de LBD dans la tempe, avant d'être frappé par un groupe de quatre à cinq personnes. «Il a été tiré comme un lapin puis roué de coups», a dénoncé vendredi à l'AFP son avocat, Me Jacques-Antoine Preziosi, précisant que le certificat médical initial du jeune homme faisait état de 60 jours d'ITT.
Immédiatement opéré en neurochirurgie et désormais porteur d'un casque, après qu'une partie de l'os crânien lui a été enlevé, il a pu rentrer chez lui jeudi après avoir été de nouveau opéré, d'une fracture de la mâchoire, a ajouté Me Preziosi. Selon l'avocat, Hedi, qui travaille dans la restauration à Meyrargues, à une quarantaine de kilomètres de Marseille, pourrait aussi avoir perdu son œil gauche.
La mise en examen des quatre policiers marseillais, mais surtout le placement en détention provisoire de l'un d'eux, comme le policier qui avait tué Nahel à Nanterre le 27 juin, a suscité l'ire des syndicats. Le directeur général de la police nationale (DGPN) Frédéric Veaux fera d'ailleurs le déplacement à Marseille samedi, pour rencontrer les effectifs des BAC, a appris vendredi l'AFP de source proche du dossier. Le patron de la police viendra «non pas pour calmer les troupes, mais pour leur parler et les écouter», selon cette source.
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«La détention provisoire est une mesure d'exception qui s'applique autant aux citoyens qu'aux policiers», ont fustigé les syndicats Alliance et Unsa, dans un communiqué aux termes presque identique à celui du syndicat des commissaires de police. «Chaque fois qu'ils doivent rendre compte à la justice, les policiers sont renvoyés à leur responsabilité individuelle, sans jamais remettre en cause leur administration», a de son côté déploré le syndicat Unité SGP Police, appelant tous les policiers de France à «se mettre en 562», c'est-à-dire ne plus assurer que les missions essentielles. «Une enquête va se faire. S'ils ont fauté, ils seront sanctionnés. Mais la détention provisoire, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase», a ajouté auprès de l'AFP Rudy Manna, du syndicat Alliance, évoquant «plusieurs dizaines» de policiers marseillais «en arrêt-maladie ou en burn out».
Quant aux applaudissements des collègues du policier placé en détention provisoire, quand celui-ci est sorti du palais de justice jeudi, «c'était une haie de soutien moral, pas une haie d'honneur», a relativisé le syndicaliste. Cette manifestation a en tous cas «bouleversé» Hedi, selon Me Preziosi : «Ca l'a brisé. Ces applaudissements, c'est un total non-respect de l'appareil judiciaire».
Jusqu'à présent, l'IGPN s'est saisie d'au moins 21 enquêtes, «de nature et de gravité très différente», sur les agissements des forces de l'ordre lors des manifestations et violences ayant suivi la mort de Nahel, avait indiqué le 12 juillet la cheffe de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), Agnès Thibault-Lecuivre. Plusieurs enquêtes judiciaires sont également en cours. A Marseille notamment, une autre enquête porte sur la mort d'un jeune homme de 27 ans, probablement après un «choc violent au niveau du thorax» causé par un projectile de «type Flash-Ball», au cours de la même nuit du 1er au 2 juillet. Une cagnotte a été ouverte pour aider les familles des quatre policiers marseillais mis en examen, à l'initiative de la Bac Sud. Pour couvrir leurs frais de justice, selon Rudy Manna. En fin d'après-midi vendredi elle comptait près de 22.000 euros.
Pas d'appel au calme de la part de Jean-Luc Mélenchon qui refuse de répondre à ce qui serait, selon lui, une injonction des "chiens de garde", lui préfère appeler à "la justice". Jean-Luc Mélenchon qui dans une vidéo vendredi se justifie : les Insoumis "sont contre toute stratégie de violences", et il précise : "ne touchez pas aux écoles aux bibliothèques, aux gymnases…", et c’est tout. Pas un mot des mairies, des commissariats, ces symboles de l'État visés aussi par les émeutiers.
Le lendemain, la maison du maire de l'Haÿ-les-Roses est attaquée par une voiture bélier. Interrogé pour savoir s'il condamnait, sur LCI, dimanche soir, Jean-Luc Mélenchon choisit ses mots et dit son "désaveu absolu de ce genre méthode", tout en refusant toujours d'appeler au calme et en semblant tirer un signe égal entre violences des émeutiers et violences des policiers.
Rien de très surprenant pour l'homme "du bruit et de la fureur", on se rappelle de ses mots, dès 2012 : "La conquête politique a un préalable : il faut tout conflictualiser" . Son fidèle Louis Boyard précise d'ailleurs que ce ne sont pas des "émeutes", mais des "révoltes", comme pour donner une noblesse politique aux violences. Par ailleurs, Jean-Luc Mélenchon espère récolter les fruits de la colère après avoir tenté en vain de la récupérer pendant les "gilets jaunes" ou pendant la réforme des retraites. Une pincée d'électoralisme aussi quand on sait que l'insoumis a fait parmi ses plus gros scores à la présidentielle dans les banlieues.
Et cette attitude, une fois de plus, divise la Nupes. Le communiste Fabien Roussel a vite précisé que son discours était "différent" et que lui, dès le début, avait appelé au calme. Même Olivier Faure, le patron du PS, s’est mouillé et a reconnu un "profond désaccord" avec Jean-Luc Mélenchon. Le signe d'une stratégie insoumise de plus en plus minoritaire qui, à force de cliver, renforce son plafond de verre et dont le discours victimaire semble oublier que les premières victimes des émeutes sont bien les jeunes des quartiers.
DÉRAPAGE Frédéric Veaux, directeur général de la police nationale (DGPN), a souhaité la libération d’un policier de la BAC de Marseille incarcéré dans le cadre d’une enquête sur des violences policières
Le malaise est palpable, même au sein de la majorité. Ce lundi, la gauche continuait d’être vent debout après les propos polémiques du patron de la police qui a estimé qu’un policier « n’a pas sa place en prison » avant son procès. « Le gouvernement a démissionné devant la frange radicalisée de la police ? Y a-t-il quelqu’un au gouvernement pour rappeler quelques notions de droit élémentaires ? » a lancé Olivier Faure, Premier secrétaire du PS.
Sur son blog, Jean-Luc Mélenchon a appelé « au respect des institutions républicaines les policiers entrés en sécession factieuse ». « Le ministre et le président doivent maintenant choisir leur option : avec ou contre la rébellion ? ». Et de marteler : « Ils doivent rétablir obéissance et discipline républicaine dans la police », « clairement condamner ce qui se passe et prendre position pour la défense de la République ».
La patronne des écologistes, Marine Tondelier, parle quant à elle d’une « bascule qui est tranquillement en train de s’opérer », et voit dans ces déclarations les ferments d’une « crise institutionnelle majeure ». La coalition de gauche Nupes a signé un communiqué commun, mais sans les communistes pour s’alarmer : « L’alerte est désormais maximale. Si ces comportements, qui mettent directement en cause l’indépendance de la justice, ne sont pas punis ils seront très vite surenchéris ».
Frédéric Veaux, directeur général de la police nationale (DGPN), a souhaité dimanche la libération d’un policier de la BAC de Marseille incarcéré dans le cadre d’une enquête sur des violences policières commises en marge des récentes émeutes. « Je considère qu’avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison, même s’il a pu commettre des fautes ou des erreurs graves dans le cadre de son travail », a-t-il assuré, recevant le soutien du préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ancien préfet de police de Bouches-du-Rhône.
Ces propos ont plongé la majorité dans l’embarras. « Non, messieurs les patrons de la Police Nationale, on ne met pas ainsi la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen en garde à vue », a tweeté le député Renaissance, Eric Bothorel. Mais, sur France 2, l’élu Karl Olive s’est dit « interpellé » par le fait que le policier est incarcéré, estimant qu’il ne s’agit pas « d’un voyou ».
Son de cloche similaire chez Robin Reda, député Renaissance de l’Essonne : « J’assume de préférer que seuls les gens dangereux soient placés en détention provisoire. Nos policiers ne représentent pas une menace », a-t-il écrit sur Twitter. Quatre policiers ont été mis en examen vendredi, l’un d’eux placé en détention provisoire. Ils sont soupçonnés d’avoir tiré au LBD sur un jeune homme de 21 ans avant de le passer à tabac, en marge des récentes émeutes.