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Derière mise à jour
07-Déc-2024
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Pendant deux mois, la France s'est arrêté, près de trente mille morts, tout le monde a été "confiné", cet imprévu dans la routine des français a été vécu de façon très varié, et chacun a retenu ce qu'il a voulu de ces événements. Vous trouverez ici un témoignage.
A partir du 2 juin 2020, la vie pourra redevenir à peu près normale en France, mais nous avons vécu un peu partout dans le monde dans des conditions exceptionnelles.
De la mi mars, jusqu'au mois de mai 2020, les magasins étaient fermés, sauf les pharmacies, les boulangeries, les épiceries et supermarchés, et paradoxalement les bureaux de tabac. Et encore, avec des conditions strictes de distance entre les clients. Un vigile était à l'entrée de l'intermarché, près de chez moi, et laissait entrer les clients au compte goutte, une entrée à chaque sortie. Les premiers jours, Intermarché distribuait du gel hydroalcoolique pour que chacun puisse se désinfecter les mains avant d'entrer dans les rayons. Chacun devait être seul, dès que cela a été possible on a rendu obligatoire le port du masque.
On a vu des cas, où une mère célibataire accompagnée de ses enfants s'était vu refuser l'entrer du super marché par un vigile trop zélé.
Les clients se sont rués sur le riz, les pâtes, et surtout sur le papier hygiénique en créant une pénurie qui a mis en colère une amie Facebook, qui se demandait combien du trou du c.. ils pouvaient avoir !
On pouvait sortir de la maison, mais il nous était interdit de nous éloigner de plus d'un kilomètre de notre domicile, si bien que lorsque j'ai repris ma voiture après six semaines d'immobilisation, elle a eu du mal à redémarrer.
Tout était fermé, même les coiffeurs !
Les entreprises ont été fortement encouragées à privilégier le télétravail, c'est à dire que parfois, les gens avaient l'impression de dormir au bureau. La situation n'était pas simple, parfois il fallait travailler, se concentrer, et en même temps faire travailler les enfants, et être dérangé par son conjoint, ou par les obligations ménagères.
Ceux qui devaient quand même aller se rendre au bureau, se trouvaient privés de machine à café, lieu de convivialité, donc de contamination possible.
Le port du masque est très commun en Asie, où la pollution est telle qu'il est nécessaire pour protéger ses poumons, l'épidémie l'a rendu encore plus nécessaire, et on a constaté que dans des pays comme la Corée ou le Japon, les gens sortaient masqués, et l'épidémie faisait moins de dégâts qu'en Europe.
L'opinion a donc demandé qu'on étende l'obligation d'en porter rapidement en France aussi. Le gouvernement a soutenu que ce n'était pas vraiment nécessaire, sauf pour le personnel médical en contact direct avec les malades. C'était faux, en vérité on n'en avait pas, et comme disait mon grand père "Quand, il n'y en a pas, il en faut pas ! ". Ce manque de franchises a nuit aux dirigeants, et on a commencé à douter de leur bonne foi.
Partout en France, des femmes se sont remises à la machine à coudre, et dans plein de villages, de nouveaux ateliers se sont improvisés. En même temps, des usines se sont reconverties. Les magasins d'habits étaient fermés, on ne pouvait écouler les vêtements fabriqués, alors quelques industriels ont occupé leur personnel dans cette fabrication.
Toutefois, la France étant désindustrialisée, elle ne pouvait en produire les centaines de millions qui étaient nécessaires en quelques jours. Les masques "chirurgicaux" ont un usage unique, le textile à base de matière plastique utilisé pour les fabriquer ne supportent pas un lavage, et le virus peut vivre de longues heures. Les masques en tissus, parfois très élégants doivent être lavés dans des conditions très strictes.
Face à la disette, on a reconstitué des stocks, afin que les masques soient disponibles lors du déconfinement, c'est à dire lorsqu'ils n'étaient plus vraiment nécessaires. Ni les magasins ni les pharmacie n'ont été approvisionnés au plus fort de la crise. Le gouvernement a décider d'en acheter des quantités énormes en Chine. On a raconté que la pénurie en France venait des grands méchants américains, qui, sur le tarmac des aéroport chinois, rachetaient plus cher les masques destinés à la France afin qu'ils soient livrés aux États Unis... enfin, lors du déconfinement, les masques étaient tous là, et on pouvait en acheter, beaucoup de magasin refusaient d'en vendre plus de deux paquets au même client.
"Restez chez vous" était le slogan national, qui s'affichait sur tous les écrans de télévision, et elles ont beaucoup fonctionné. Les distributeurs de films payant à la demande, ou par abonnement comme Netflix, on vu leur chiffre d'affaires s'envoler. Tout le monde n'a pas vécu cet enferment de la même façon. Les plus mal lotis étaient les familles nombreuses dans des logements sans balcon ni terrasse, dont les parents étaient obligés de travailler à domicile.
La visio conférence a été utilisée très largement, soit pour des réunions de travail, soit pour des cours, soit même pour des apéritifs festifs entre collègues, ou entre parents et amis.
S'isoler a été un grand problème, certains ont bien tenté d'attacher leurs conjoints, et leurs enfants sur leur lit pendant la réunion, mais tout le monde n'a pas réussi.
Le nouveau service Zoom a eu un grand succès, nous nous en sommes servi par exemple pour le repas de pâques, nous avons vécu la même cérémonie traditionnelle, avec nos enfants parisiens. On a vraiment eu l'impression d'être assis autour de la même table. Une autre fois nous avons joué à un jeu de société en y associant la famille israélienne.
La visio conférence a également été utilisé dans un but médical, ne pouvant nous déplacer, nous avons eu droit à une télé consultation, payante, comme il se doit, mais de qualité. Le médecin n'avait dans ce cas pas besoin de nous ausculter. Certains y voient une opportunité pour résoudre les problèmes dans les déserts médicaux, et pour permettre des économies à la sécurité sociale. On a un peu peur de cette généralisation, la présence physique est-elle tellement superflue ? Le médecin ne sent-il pas certaines choses qui ne peuvent passer à travers un écran ?
Sur le plan religieux, des messes et des offices juifs ont eu lieu ainsi, et j'ai assisté à des prières dans une synagogue virtuelles réunissant des centaines de personnes. Ce devait être temporaire, pendant la crise du virus, mais vu le succès, certains envisagent de pérenniser le système, même si nécessaire en demandant une petite contribution aux participants.
A l'université, on s'est rendu compte qu'un cours magistrale pouvait très bien être suivi par mille, dix mille, cent mille élèves en même temps. Cela a donné des idées à des responsables académiques qui y ont vu une source d'économie, à la plus grande inquiétude des enseignants qui craignent pour leur gagne pain.
Cette période ensoleillée nous a donné l'occasion de faire connaissance avec des voisins, et leurs petits enfants. Dans le grand jardin de la copropriété, on trouve des arbres, des arbustes et de l'herbe, j'y ai ajouté des fleurs, des groseilliers et de la vigne. Depuis le confinement, je n'y suis plus tout seul, deux jeunes sportives couraient le marathon, en en faisant 24587 fois la longueur, un boxeur abîmait l'herbe en s'entraînant contre un fantôme manifestement plus fort que lui, des jeunes parents amenaient leurs petits bout de choux. Comme il faisait un temps superbe, j'ai du arroser les fleurs, et en même temps, exerçant mes talents pédagogiques, j'ai enseigné l'arrosage aux petits enfants des voisins, et ô miracle, ils se sont transformés en pompiers et ont arrosé copieusement leurs parents, comme s'ils étaient de vulgaires fonctionnaires ! !
A vingt heures, tout le monde était au balcon pour applaudir le personnel médical, en suivant les consignes de notre Président, et c'était une occasion de se faire des petits coucous d'une fenêtre à l'autre..
N'ayant le droit que de marcher à un kilomètre de la maison, et ce printemps étant miraculeusement ensoleillé, avec Édith, ma moitié, nous avons fait l'inspection des jardins des voisins, en attribuant de bonnes notes à ceux qui avaient de jolies fleurs, et de super bonnes notes à ceux qui avaient laissé des fruits mûrir à porté de main des promeneurs dans la rue... Pourquoi donc ceux qui ont des figuiers les mettent ils si loin de la rue ? ? c'est très surprenant, mais on trouve à Dijon plus de figuiers que de cerisiers. Nous avons découvert un jardin à la japonaise, avec un parterre de galets, noirs, blancs, ou briques, parsemés de conifères, et de plantes aux formes très étudiées. On s'est rendu compte que beaucoup de monde, parmi les plus aisé semblait avoir abandonné sa luxueuse villa probablement pour une résidence secondaire que nous imaginons merveilleuse.
Pendant deux mois, nous sommes resté à la maison, ou dans le quartier, nous n'avons jamais fait autant d'économie ! A la télévision, à la radio, sur le journal, on ne nous parlait que du virus, soixante cinq millions de médecins français discutaient des mérites de l'hydroxychoroquine, des messages répétitifs nous appelaient à la prudence, tous les débats portaient sur ce maudit coronavirus, le covid-19 et régulièrement on entendait la voix de croque mort du ministre nous énoncé le nombre de personnes hospitalisées, en réanimation, ou mortes. Le Président Macron a beaucoup parlé, Edouard Philippe aussi, et tout le monde a commenté. J'ai surtout remarqué que la barbe du premier ministre blanchissait d'une façon curieuse... avoir un premier ministre barbu est un privilège que je n'avais jamais eu auparavant.
Cette disponibilité m'a permis de prendre du temps pour faire du rangement, là où je n'en faisais jamais, ce n'était pas original, surtout au début du confinement, lorsque je me promenais dans le quartiers, je voyais les voisins en train de nettoyer leurs fenêtres, de repeindre leurs portes... on ne peut pas être inquiet pour le chiffre d'affaires des magasins de bricolage.
N'étant pas un champion du tourne vis, et habitant un logement neuf, je me suis remis à la peinture, et j'ai réalisé à l'aquarelle un portrait de mes enfants... enfin plusieurs fois le même, avant d'en avoir un qui soit à mon goût. Que de travail... si vous souhaitez le voir, il vous suffira de le demander.
D'autres heureux du confinement ont été les animaux et leurs amis, en se promenant dans des rues sans voitures, on a pu entendre en ville le chant des merles, si beau qu'on leur pardonne de nous voler nos cerises. On nous a raporté que des animaux rassurés par le silence se sont hasardés en ville, des sangliers, des renards, des cervidés.
Le ciel aussi était plus pur, plus d'avion, depuis mon balcon je pouvais ignorer où était Paris le point de raliement de toutes les trainées blanches dans le ciel.
Lorsqu'on va de Tél Aviv à Paris, on vol au dessus de Dijon. La nuit, on peut voir le plan de la ville illuminé.
La mortalité a été très forte dans les maisons de retraite, surtout dans les EHPAD, établissements d'hébergement pour personnes âgées ou dépendantes. Les résidents ont été strictement confinés dans leur chambre. Ils ne pouvaient plus sortir, ni manger ensemble, les repas étaient apportés dans la chambre. Bien sûr toutes les visites étaient interdites. C'était tout ou rien, soit l'établissement passait à travers les gouttes, soit c'était une hécatombe, parfois le tiers des pensionnaires sont décédés.
En règle général, la mortalité dépendait surtout de l'âge, puis de l'obésité, et des troubles liés à l'obésité comme le diabètes et les maladies cardiaques. Le confinement avait pour but essentiel d'éviter que tout le monde se retrouve en même temps à l'hôpital qui aurait été saturé et aurait été obligé de sélectionner les malades à soigner. Lorsqu'on a parlé de déconfinement, certaines têtes d'oeuf avaient proposé que les plus de soixante cinq ans restent encore confinés tout l'été afin qu'ils encombrent le moins possible les hôpitaux. Les seniors en bonne santé ont naturellement hurlé, devant cette atteinte inadmissible à leur liberté, qui aurait été anti constitutionnelle.
Cette idée a été très rapidement abandonnée, le risque ne dépend pas exactement de l'âge, il y a dans la société une terrible inégalité. Certains ministres sont vaillants comme des gardons à quatre vingt cinq ans, et à soixante cinq d'autres personnes sont quasiment grabataires. Surtout les personnes dans les EHPAD sont dépendantes, elles entendent mal, voient mal, se déplacent mal, si bien qu'elles s'enferment dans leur pensées, et même présentes, elles sont pour la plupart absentes. Le confinement n'a pu qu'accélérer cet isolement, malgré le dévouement du personnel soignant.
Pendant toute cette période, les radios et télévisions nous ont abreuvés de messages appelant à la prudence, et pour certaines personnes hypocondriaques, ou manquant d'esprit critique, cela a été terriblement traumatisant.
C'est le vivre ensemble qui a été attaqué, chaque être humain à proximité devenait un danger mortel. N'avons nous pas tous besoin de câlins ?
La communauté juive a été particulièrement frappée, la fête de Pourim, au printemps a donné lieu à de grandes réjouissances qui ont conduit de nombreux dirigeants communautaires à l'hôpital, et parfois même au cimetière. Aussi lors du déconfinement, lorsque le président Macron a autorisé sous conditions l'ouverture des lieux de culte, le consistoire central a diffusé une notre donnant les règles strictes d'ouverture, je vous laisse le lire le document peut figurer parmi les meilleurs feuilles décrivant la prudence caricaturale bien naturelle de la part de ceux qui ont senti le vent du boulet.
Samedi donc, notre synagogue ouvrira avec prudence, avec un virus devenu très rare, comme le montre le graphique ci-dessous.
En attendant, le masque est obligatoire dans tous les magasins, et si les restaurants et cafés viennent d'être autorisés à revenir, la prudence impose des normes qui limitera les capacités d'accueil. Bien sûr tout cela agira sur le Chiffre d'Affaires et sur l'emploi.
On attend avec appréhension les mois qui vont venir, la priorité donnée à la santé sur l'activité économique aura de lourdes conséquences sur l'équilibre des comptes publics, on craint un chômage de masse et des troubles sociaux, les distanciations sociales ont crée de nouvelles habitudes moins chaleureuses, plus méfiantes.
Il ne nous reste qu'une seule certitude, c'est que l'avenir ne sera pas celui que nous avons prévu, les meilleures prévisions concernent toujours le passé !
Michel Lévy