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Guerre civile en Syrie


lundi, 12-Nov-2012
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La Syrie est un pays malade de la tyrannie de son chef, et de ses divisions religieuses. La faiblesse attire les prédateurs. Les monarchies sunnites aimeraient bien utiliser le territoire Syrien pour acheminer leur gaz, et la Russie ainsi que l'Iran s'y opposent. Les intérêts des uns et des autres se traduisent en une averse d'armes et de fonds qui nourrit la guerre. Au milieu les populations souffrent, des chrétiens prennent la route de l'exil, les alaouites craignent des massacres, et les kurdes rêvent d'indépendance.

 

  La Syrie souffre depuis plus d'un an d'une guerre civile impitoyable, comment a-t-on pu en arriver là ?
 

Quelques points d'histoire

La Syrie est un des plus vieux pays du monde, le nom est cité dans la bible, et les archéologues ont trouvé la trace de grandes villes plusieurs fois millénaires hautement civilisées. Le pays a été christianisé, faisant partie de l'Empire Romain d'Orient, l'influence grecque et phénicienne y a été énorme, puis la conquête arabe a apporté l'islam à la majorité de la population, et Damas est devenue la capitale de l'empire Omeyyades, le premier empire arabe.

Le pays est arabophone dans sa grande majorité, il est fondateur de la ligue arabe, et a toujours été très nationaliste, n'a t-il pas été le premier à secouer le joug colonial français en rejetant en négociant dès 1936 ? dès l'indépendance de 1946 n'a t-il rompu quasiment de suite les liens avec la France ? n'a t-il pas participé, voir initié, au nom de la solidarité arabe toutes les guerres avec Israël ? pourtant l'histoire n'est pas si simple.

carte

 

En 1900, la Syrie n'existait pas. Pas plus d'ailleurs que le Liban, l'Irak, Israël, la Palestine, ou la Jordanie ! cette carte représente les divisions administrative de l'Empire turque à cette époque. Alep était une ville de même importance de Damas, Urfa est aujourd'hui en Turquie, Dair az-zor en Syrie. Tripoli est au Liban, Lattakié en Syrie.

Les Syriens sont-ils arabes ? un correspondant syrien m'expliquait sur Internet un jour, «Je parle l'arabe, j'aime l'arabe car c'est la langue du prophète et des poètes, mais que voulez vous, mes ancêtres étaient des pionniers de la civilisation urbaine, ma culture n'a rien à voir avec celle d'un bédouin d'Arabie, je ne suis pas arabe, mais Syrien
L'État Syrien actuel englobe des terres arabophones découpées par des européens dans l'immense empire turc. Il n'y a pas d'homogénéité, comme tout le proche orient, la Syrie est un patchwork de peuples et de religions.

Comme dans toutes les terres d'empire, les gens vivent en communauté, on est d'abord sunnite, alaouite, maronite, orthodoxe, druze, chiite etc... . En orient la religion détermine l'identité avant tous les autres critères nationaux ou ethniques. Les nations sont récentes dans la région, et les peuples qui les composent forment au mieux des mosaïques quand tout est harmonieux, et au pire des patchworks .

L'histoire actuelle provoque des déchirements qui tendent à se foscilliser, et qui peuvent provoquer l'éclatement des états nations actuels, l'Irak est très menacée, mais elle est loin d'être seule.

Quand le peuple Syrien a-t-il été inventé ? (pour reprendre un ouvrage fameux de Shlomo Sand ) Il est assurément le mélange d'une culture millénaire, et d'un état récent, avec une intégration plus ou moins complète de nombreuses minorités. Un peu comme les autres états de la région, la Syrie peut éclater, comme l'Irak, le Liban ou la Turquie, mais rien n'est moins sûr.


 

 

Les alliances syriennes

Hafez el Assad a été formé en Union Soviétique, où il a conservé d'excellents contacts, pour cela il a concédé à Moscou la base de Tartous . Son fils, Bachar continue cette alliance. Aujourd'hui, la Russie est un excellent allié de la Syrie, qui lui fournit des armes, et qui n'acceptera pas un changement de régime qui lui soit défavorable.

 

La famille Assad est Alaouite, une minorité importante de Syrie, leur religion est très éloignée de l'islam Sunnite. Est-ce pour cela ? mais Assad père et fils ont noué de bonnes relations avec l'Iran, et avec la communauté chiite du Liban. Le Liban, est un morceau de la Syrie détaché par les français en 1920 dans le but de donner un état refuge pour les chrétiens de Syrie qui étaient régulièrement l'objet de persécutions. Rien ne distingue foncièrement les populations syriennes et libanaises, et la famille Assad a toujours rêvé de réunifier les deux pays, et n'a pas hésité, le cas échéant, à participer aux guerres civiles, ou à provoquer des attentats spectaculaires.

Naturellement, le clan Assad soutient le Hezbollah, les armes iraniennes passent par la Syrie, en ayant le contrôle de cette importante milice, plus des appuis sérieux auprès de grands féodaux chrétiens ou musulmans, Damas espère tôt ou tard reunifier la Syrie en récupérant le Liban qui se vide lentement de ses éléments chrétiens et pro-occidentaux.

Le printemps arabe :

Au printemps 2011, des mouvements de contestation ont soulevé tout le monde arabe, parti de Tunisie, il s'est répandu en Lybie et en Égypte où les dictateurs ont été renversés plus ou moins rapidement. La contestation a été aussi très violente au Yémen, mais maitrisée en Jordanie, en Algérie et au Maroc. On a pu constater au bout de quelques mois, que ces révolutions ont souvent été fromentées par des intellectuels libéraux ou socialistes, et que la jeunesse estudiantine et pro occidentale y a pris une grande part. Mais très rapidement les islamistes ont tout récupéré, car ils animent les mosquées qui regroupent une masse de soutient populaire infiniment plus importante.

Personne n'a été étonné quand de grandes manifestations ont eu lieu à Alep, Damas et Hama. Le président Bachar El Assad fils d'Hafez El Assad dirige comme son père le pays d'un main d'acier. Depuis son indépendance, la Syrie est dirigée par des militaires, qui utilisent le coup d'Etat pour prendre le pouvoir. On ne plaisante pas avec l'autorité, la ville de Hama (ancienne Epiphania antique) s'était révoltée en 1982, Hafez El Assad a fait donner le canon, et on a dénombré entre 6 et 35 000 morts... quelques lignes dans la presse internationale, le tueur n'était pas israélien.

 

 

La guerre civile :

Tout à commencé par des manifestations pacifiques, mais la dictature syrienne ne resemble pas à la dictature bon enfant d'Egypte ou de Tunisie, de suite la répression a été d'une sauvagerie extraordinaire. Sans état d'âme, des snipers ont tiré sur la foule, la police a fouillé les hôpitaux pour torturer et exécuter les blessés. Aussi rapidement, des militaires ont déserté et pris les armes. Les révoltés ont appelé au secours, et des volontaires venus de Turquie, du Yemen, et de tous les pays sunnites sont venus à leur aide. En même temps, le régime syrien a appelé à l'aide son obligé le Hezbollah, tandis que les experts iraniens sont venus prêter main forte en envoyant des régiments de gardiens de la Révolution, mais surtout des experts en répression. Il faut savoir que le régime de Téhéran a toujours réussi a mâter ses opposants même quand ils se comptaient en millions. La Syrie a toujours encouragé les mouvements les plus radicaux, aussi, Khaled Mechaal, président du Hamas s'était-il réfugié à Damas d'où il ne craignait pas les avions israéliens. Or Mechaal a pris position pour les insurgés, cette trahison n'a pas plu à Bachar El Assad qui n'a pas le sens de l'humour comme on a pu le remarquer, aussi Mechaal a du se réfugier en catastrophe en Arabie.

La guerre à ce jour a fait plus de 30 000 morts, Assad n'hésite pas à faire bombarder les villes, les insurgés contrôlent les zones rurales, bloquent les route, sont retranchés dans des quartiers sunnites d'Alep, et ont mené des combats dans toutes les villes, et à la frontière turque. Je ne vous parlerai pas des crimes de guerre, d'après mes échos, les insurgés sunnites ne sont pas en reste, il y a parmi eux des milices criminelles, on parle d'Al Quaïda, de Salafistes, et cela fait longtemps que les démocrates syriens qui espéraient une transition non violente sont hors course.

Les occidentaux ont de suite parié sur la chute du régime Assad, et certains comme BHL ont conseillé une action militaire, mais ici le contexte n'est pas celui de la Lybie. Ni la Russie, ni l'Iran, ni la Chine n'accepteront d'intervention. Alors on regarde cette bataille entre Sunnites et Chiite, qui contamine aussi le Liban où des heurts on lieu, le responsable de la sécurité libanaise, le général Wissam al Hassan a été assassiné au cours d'un spectaculaire attentat don Bachar El Assad a le secret. Le général voulait un Liban indépendant, et soutenait la rébellion sunnite.

 

Les minorités :

La majorité du peuple est sunnite à 70 % environ, mais plus d'un syrien sur dix est Alaouites, ils professent une dissidence datant du IX ième siècle. Daniel Pipe a rédigé un long papier sur les Alaouites, dont cet élément sur leur religion qui explique beaucoup de choses :
« Certains doctrines alaouites semblent provenir du paganisme phénicien, du Mazdéisme et du Manichéisme. Mais de loin la plus grande affinité est avec le Christianisme. Les cérémonies religieuses alaouites impliquent du pain et du vin ; en effet, boire du vin a un rôle sacré dans l'Alaouisme, car cela représente Dieu. La religion tient Ali, le quatrième calife, comme l'incarnation (comme Jésus) de la divinité. Elle a une sainte trinité, composé de Mahomet, Ali, et Salman al-Farisi, un esclave affranchi de Mahomet. Les Alaouites cèlébrent de nombreuses fêtes chrétiennes, y compris Noël, le Nouvel An, l'Epiphanie, Pâques, la Pentecôte et le dimanche des Rameaux. Ils honorent de nombreux saints chrétiens: Sainte-Catherine, Sainte-Barbe, Saint-Georges, Saint-Jean-Baptiste, saint Jean Chrysostome et de Sainte-Marie-Madeleine. Les équivalents arabes de noms de personnes chrétiens comme Gabriel, John, Matthew, Catherine, et Hélène, sont d'usage courant. Et les Alaouites ont tendance à montrer plus de gentillesse pour les chrétiens que pour les musulmans. »

Les français pendant leur mandat les avaient privilégiés comme les chrétiens en vue de diviser les syriens pour mieux asseoir leur mandat. Daniel Pipe explique comment la minorité alaouite a réussie à capter le pouvoir, et à noyauter l'armée et le parti Baas, le parti unique, nationaliste socialiste et laïque qui gouverne toujours la Syrie et a dirigé l'Irak de Saddam Hussein.

Les chrétiens sont extrêmement divisés, comme les Alaouites, ils ont subit la loi des sunnites, ont parfois été persécuté, et la plupart ont bénéficié d'un régime qui les a protégé. Pour cette raison, même les démocrates qui ont horreur de la violence de la tyrannie d'Assad n'ont généralement pas rejoint la rébellion sunnite.

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Les minorités chrétiennes et alaouites soutiennent donc plus ou moins ouvertement le régime du président Assad, et en conséquence sont dans la ligne de mire de l'Armée de Libération de la Syrie, (ALS). Dès à présent, les chrétiens fuient les zones de combat, surtout là où les sunnites de l'ALS avancent. On a signalé des exactions contre les civils, et j'ai lu des messages dramatiques d'Arméniens d'Alep. C'est vers Alep que les turcs avaient acheminé les populations déportées d'Arménie en 1915, la plupart sont morts en route, et les survivants enfermés dans des camps ont fini par être libérés et par s'installer dans la ville où ils ont profité d'une sécurité qui leur avait permis de reconstruire leur vie. Aujourd'hui, ils cherchent à fuir vers l'Arménie, l'Europe ou l'Amérique, il paraît que plusieurs sont arrivés à Dijon.

En cas de victoire des sunnites, les alaouites et les chrétiens craignent des représailles et des massacres. Les uns aident Assad, les autres tentent de fuir ou font le dos rond.

Les Druzes, 3 % de la population, sont plutôt pour la révolution, et contre la rebellion, si bien qu'ils ne sont pas entré dans la lutte armée. Il y a eu peu de combat dans le Djebel Druze, même si un obus ou deux sont tombés par accident dans le Golan Israélien. Cette guerre civile aurait quelque peu fait évoluer la position des Druzes du Golan qui seraient plus nombreux à demander la nationalité israélienne, toutefois cela n'a pas freiné les départs d'étudiants vers l'Université de Damas.

Les Kurdes, eux, sont à l'est, (Voir carte plus haut) une grande partie d'entre eux ne se sentent pas syriens, et souhaiteraient être rattachés à un état Kurde à naître, dont le Kurdistan Irakien est aujourd'hui le coeur. Profitant de la faiblesse du pouvoir, les Kurdes de Syrie ont pris le contrôle des zones où ils sont majoritaires. Les opposants au régime syrien regardent avec suspicion la neutralité adoptée par les dirigeants Kurdes dans le conflit qui les oppose à Bachar al Assad. Les Kurdes critiquent de leur côté le refus de l'opposition de les voir acquérir une autonomie locale. Des affrontements ont eu lieu entre des Kurdes proche du PKK et des opposants Syriens.

Les palestiniens sont surtout concentrés en cinq «camps» qui sont en fait des villes, parfois relativement cossues. Leurs quartiers sont encadrés par le FPLP CG (Front de Libération de la Palestine Commendement Général) d'Ahmed Djibril qui est une couroie de transmission du gouvernement Syrien. Il y a eu des bataille dans le «camp» de Yarmouk entre partisans des insurgés et les troupes d'Ahmed Djibril, qui ont été appuyées par l'aviation. Pro et anti Assad s'accusentm mutuellement d'être des agents sionistes ! !

 

La Géopolitique

La Syrie est au milieu d'une zone qui évoque les Balkans d'avant 1914, avec en toile de fond, la rivalité Shiite, Sunnite. Le président Assad est appuyé fortement par l'Iran, par des milices Shiites Irakiennes, et par le Hezbollah, à contrario, l'Armée de Libération de la Syrie est soutenue par la Turquie, les milices sunnites libanaises et irakiennes, et par les arabes sunnites. Parmis eux, il faut penser à l'Emir du Qatar, ce puissant personnage possède en partage avec l'Iran le plus grand gisement gazier du monde.

Or livrer le Gaz en Europe n'est pas facile, le Qatar aurait besoin d'un Gazoduc pour relier la Méditerranée, le plus simple serait de traverser la Jordanie et Israël, mais c'est politiquement incorrect. Alors il faut passer par la Syrie, et ce pays est un allié stratégique de la Russie et de l'Iran. L'Europe dépend énormément du Gaz Russe, faire jouer la concurrence avec du Gaz Qatari devenu moins cher grâce au gazoduc serait très intéressant, et mettrait l'Europe à l'abri d'un éventuel chantage Russe. Les iraniens ont un projet similaire, en passant par l'Irak shiite et la Syrie, il est facile d'amener ce même gaz au pied de la mer bleue.
On a donc une concurrence frontale entre l'Iran et le Qatar, et entre le Qatar et la Russie.

L'Europe a pris le parti du Qatar, si par miracle, la Syrie changeait d'alliance, si les sunnites prenaient le pouvoir, on atteindrait plusieurs buts simultanés :
a) Isoler l'Iran et le couper de sa milice libanaise : le Hezbolah
b) Gêner l'exportation de gaz iranien
c) Disposer d'un concurrent sérieux au gaz Russe, ce qui ferait baisser les prix et garantirait une sûreté des approvisionnements en cas de conflit avec la Russie. (On se souvient des problèmes entre la Russie et ses clients Est-Européens)

gazoduc

Ceci explique l'engagement des occidentaux en faveur des rebelles, mais leur incapacité à mener des opérations militaires, ils ne souhaitent pas se frotter aux russes, ni aux iraniens.

Quand à Israël dans tout cela ? Netanyahu a donné l'ordre à tous ses ministres de se taire sur le sujet. Israël est neutre, il n'aurait que des coups à prendre à se mêler d'un conflit où il n'a que des ennemis ne rapporterait rien. Alors, il boucle sa frontière, et fait l'impossible pour se faire oublier. Le pire c'est qu'il y réussit ! ! tant pis pour ceux qui croient qu'Israël est la source de tous les conflits de la région.

Michel Lévy